L'abbaye de la Trinité de Vendôme est fondée en 1033 par Geoffroy Ier Martel, comte de Vendôme[1]. La légende raconte que le comte de Vendôme vit trois étoiles tomber dans un puits, y voyant là un signe divin, Geoffroy Martel décida d'ériger à cet emplacement une abbatiale.
Localisation
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Histoire
Très rapidement prospère, l'abbaye est fréquemment en conflit avec les comtes de Vendôme à propos de leurs droits respectifs, conflit où ils eurent souvent le dessus.
L’un des événements marquants de l’histoire de l’abbaye est sans conteste la venue du pape Urbain II :
Le concile de Clermont terminé, Urbain II, reprenant son périple, accompagné, en partie, par l’abbé Geoffroi de Vendôme, allait s’arrêter à Vendôme après avoir encore visité une douzaine de villes en à peine trois mois. Venant du Mans, le pape fut ainsi reçu en l’abbaye de la Trinité du 19 février au 3 mars 1098 soit pendant une dizaine de jours, accompagné, entre autres, du cardinal Raynier (Reniero) qui lui succédera, sous le nom de Pascal II. Puis, il rejoindra les abords de Tours (Rochecorbon, plus exactement), où il consacrera l’église abbatiale de Marmoutier nouvellement rebâtie.
Parce que pourvue, dès sa fondation, de moines clunisiens de Marmoutier, tout comme d’ailleurs l’amitié qui liait l’abbé-cardinal au pape, l’abbatiale romane de la Trinité dont la dédicace remontait au 31 mai 1040 passait alors pour un lieu hautement privilégié auprès de sa Sainteté qui ne cessera, nous dit-on, de «combler son cher Geoffroy de tous les témoignages de son affection».
Ainsi, durant son séjour à Vendôme, le 4 des calendes de mars, soit le 26 février, d’après la chronique d’Anjou, Urbain II devait consacrer un crucifix supposé à l’entrée du chœur roman et sans doute placé au-dessus d’un autel, tout en accordant « pénitences aux fidèles qui célébreraient dévotement l’anniversaire de cette dédicace mémorable ». Mais selon le nécrologe de l’abbaye (cartulaire de la Trinité), il s’agirait plus sûrement de la consécration d’un autel dédié à la Sainte Croix et à Saint-Eutrope dont l’église, à l’époque, possédait des reliques.
Cette abbaye fait l'objet de protections au titre des monuments historiques[3] : un classement par la liste de 1840 concernant l'église de la Trinité, une inscription en 1948 concernant les vestiges de la chapelle Saint-Loup, un classement en 1949 concernant les façades et les toitures des bâtiments de l'ancienne abbaye, la salle capitulaire et la cour du cloître et une inscription par arrêté du concernant les greniers, les façades et toitures du bâtiment Régence et le mur de clôture de l'ancien logis abbatial.
Architecture
L'abbatiale de la Trinité est un monument majeur du Moyen Âge français. Elle comprend des éléments d'architecture du XIe siècle, un chœur du XIVe siècle, un clocher roman haut de 80 mètres, une façade flamboyante.
Le clocher.
Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations contenues dans cette section proviennent du Dictionnaire raisonné de l’architecture française du xie au xvie siècle[4].
Au point de vue de la construction, et sous le rapport du style, le clocher a subi l’influence de deux styles, du style roman ancien né dans les provinces occidentales, et du style qui se développait sur les bords de l’Oise et de la Seine dès le commencement du XIIe siècle, le style désormais appelé style gothique.
Sa base est une salle carrée, voûtée par une calotte en arcs de cloître, avec quatre trompillons aux angles donnant pour le plan de la voûte un octogone à quatre grands côtés et quatre petits. Sur cette voûte, dont la coupe est en tiers-point, s’élève, au centre, un pilier carré cantonné de quatre colonnes engagées.
Quatre arcs doubleaux, en tiers-point, sont cintrés du pilier B aux quatre piliers engagés. Mais, pour porter en toute sécurité le pilier central, deux arcs croisés, concentriques à la voûte, viennent reposer sur les murs de l’étage inférieur, et, afin d’éviter le relèvement de ces deux arcs croisés sous la charge du pilier, quatre arcs-boutants, sortes d’étrésillons, aboutissent sous les bases des colonnes des quatre piles engagées.
Sont les deux arcs croisés sur l’extrados de la voûte et portant le pilier central ; les arcs-boutants aboutissant sous les bases des colonnes engagées des piliers adossés aux murs. Des portions de mur étrésillonnant le système d’arcs. Les pans coupés de la voûte inférieure en arcs de cloître ne sont pas inutiles ; ils tiennent lieu des pièces de charpente que l’on place aux angles des enrayures et que l’on désigne sous le nom de goussets ; ils empêchent le roulement de tout le système, relient et étrésillonnent les angles de la base en maçonnerie. Des moyens si puissants devaient avoir un motif. Ce motif était de porter, sur le pilier central, les quatre arcs doubleaux et la retraite, un énorme beffroi en charpente, auquel la partie supérieure du clocher servait d’enveloppe. Les constructeurs avaient compris, à mesure qu’ils donnaient plus d’élévation à leurs clochers, qu’il fallait, aux beffrois de charpente mis en mouvement par le branle des cloches, un point d’appui solide, près de la base du clocher, là où la construction épaisse et chargée n’avait rien à craindre des pressions inégales des beffrois. Or, les quatre arcs doubleaux et la retraite portaient l’enrayure basse de ce beffroi, et cette construction de pierre, bien appuyée, bien étrésillonnée, conservait cependant une certaine élasticité.
À partir de cette base, l’enveloppe, la partie supérieure du clocher, n’ayant à subir aucun ébranlement, pouvait être légère ; et, en effet, le clocher de la Trinité de Vendôme, si on le compare aux clochers précédents sa construction, est très-léger relativement à sa hauteur, qui est considérable (environ 80 m de la base au sommet de la flèche).
Jusqu’alors, dans les clochers romans, une simple retraite ou des trous dans les parements intérieurs, ou des corbeaux saillants, ou une voûte en calotte, recevaient l’enrayure basse des beffrois en charpente ; et peu à peu, par suite du mouvement de va-et-vient que prennent ces beffrois, les constructions se disloquaient, des lézardes se manifestaient au-dessus des ouvertures supérieures, les angles des tours fatiguaient et finissaient par se séparer des faces. Si la charpente des cloches reposait à plat sur une voûte dont les reins étaient remplis, le peu d’élasticité d’une pareille assiette produisait des effets plus funestes encore que les retraites ou les corbeaux sur les parements intérieurs. Car ces voûtes, pressées tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, se disjoignaient d’abord, et produisaient bientôt des poussées inégales. Le système d’assiette de beffroi adopté dans la construction du clocher, par sa complication même et la pression contrariée des arcs inférieurs, à cause de ces deux étages d’arcs séparés par une pile, possède une élasticité égale à sa résistance, et divise tellement les pressions alternatives du beffroi en charpente qu’elle arrive à les neutraliser complètement. Cela est très-savant et fait voir comme, en quelques années, sous l’influence des écoles nouvelles, les lourdes constructions romanes s’étaient transformées.
Le clocher est peut-être le premier qui soit élevé sur un programme arrêté. Ce n’est plus une tour de quasi défense sur laquelle on a élevé un beffroi, ce n’est plus un porche surmonté de salles et terminé au sommet par une loge ; c’est un véritable clocher, construit de la base au sommet pour placer des cloches, c’est une enveloppe de cloches, reposant sur l’assiette d’un beffroi. Tout en conservant la plupart des formes romanes, comme construction, il appartient à l’école nouvelle ; il remplace les résistances passives de la construction romane par les résistances élastiques, équilibrées, vivantes de la construction gothique. Ce principe, découvert et mis en pratique une fois, eut des conséquences auxquelles les architectes ne posèrent de limites que celles données par la qualité des matériaux, et encore dépassèrent-ils parfois, grâce à leur désir d’appliquer le principe dans toute sa rigueur logique, ces limites matérielles.
Voyons maintenant le clocher à l’extérieur. Bien que déjà les baies soient fermées par des archivoltes en tiers-point peu prononcé, son aspect est roman ; son étage supérieur octogonal sous la flèche nous rappelle les couronnements des clochers de Brantôme et de Saint-Léonard, avec leurs gâbles pleins sur les grandes baies principales, et les pinacles des clochers de l’Ouest. Les archivoltes de ces pinacles, ainsi que ceux de l’arcature sous la pyramide, sont plein-cintre. Mais la pyramide devient très-aiguë ; elle est renforcée de nerfs saillants sur ses angles et sur le milieu de ses faces ; elle n’est plus bâtie en moellons, conformément à la vieille tradition romane, mais en pierres bien appareillées, et ne porte, dans cette énorme hauteur, que 0,50 c. d’épaisseur à sa base et 0,30 c. à son sommet.
Au niveau des pinacles: sont portés sur des colonnettes alternativement simples et renforcées d’un petit pilier carré ; leur plan est circulaire. C’est encore là un dernier vestige des traditions du Périgord. On observera que l’escalier en pierre accolé à la tour ne monte que jusqu’au-dessus de la voûte de l’étage inférieur. Conformément aux habitudes romanes, on ne montait dans le beffroi en charpente que par des échelles de bois.
L’abbatiale gothique
L'église gothique a repris le plan du chevet roman à cinq chapelles rayonnantes. La clôture du chœur est ornée de sculptures gothiques flamboyantes et Renaissance. Les stalles ont des miséricordes sculptées de pittoresques scènes de la vie quotidienne et des métiers. La clôture du chœur et les stalles ont été commandées par l'abbé Louis de Crevant et terminées par son neveu Antoine dans la première moitié du XVIe siècle[5].
La façade
En 1508, le maître d'œuvre, Jehan Texier dit Jehan de Beauce, réalise la façade de l’abbatiale de la Trinité. Cet embrasement sculpté est un des chefs-d’œuvre de l'art gothique flamboyant. Le clocher de l'église constitue aussi un édifice exceptionnel construit au XIIe siècle. Il ressemble au clocher sud de la cathédrale de Chartres qui lui est contemporain. En 1791, les bâtiments de l’abbaye de la Trinité sont mis en vente. Les locaux abritent un tribunal, des prisons et la sous-préfecture. C'est en 1802 que s'établit un quartier de cavalerie prenant le nom de quartier Rochambeau en 1886. Près de trente bâtiments (écuries, manèges, magasins…) vont être progressivement construits. Le 20e Chasseurs à cheval, décimé en 1914, termine la liste des régiments stationnés à Vendôme. La gendarmerie, dernier occupant des lieux, est réinstallée à proximité immédiate, depuis 1996.
Le clocher roman de la Trinité à gauche et l'église gothique de la Trinité à droite.
La cour du cloître
Il est au cœur du fonctionnement de cette abbaye bénédictine et comprend : le dortoir, le réfectoire et le logis des hôtes. La cuisine circulaire (comme à Fontevraud) et l’aile sud ont été remplacées par un bâtiment plus imposant, nécessaire à l’accueil des moines bénédictins mauristes au XVIIIe siècle. Seule la partie nord de la galerie du cloître, le long de l’église, a survécu à la démolition décidée par l’armée en 1907.
La salle capitulaire
Les murs de la salle sont ornés de très belles fresques (fin XIe siècle début XIIe siècle) découvertes en 1972 derrière un mur du XIVe siècle. « La Pêche miraculeuse » (Jean 21, 1-14) demeure la plus belle de ces scènes illustrant des événements survenus après « La Résurrection du Christ ».
Les cuisines
Les cuisines médiévales étaient circulaires, d'un type proche de celle encore conservée à Fontevrault
Intérieur
Vitraux
L'ensemble des verrières sont classées aux Monuments historiques[6]. Dans la baie 0 de la chapelle axiale, dite du « Saint-Sacrement », le vitrail de la Vierge de Vendôme représente le type primitif de la célèbre Notre-Dame de la Belle Verrière de la Cathédrale de Chartres. Mesurant 240 cm de haut sur 60 cm de large, il date du XIIe siècle.
Reliques
L'abbaye abritait plusieurs reliques, dont la relique de la Sainte Larme. La Sainte larme était un bloc de cristal dans lequel se trouvait une goutte d'eau. La relique était placée dans une armoire connue par des dessins[7],[8]. Les bénédictins sont chassés de l'abbaye en 1790. Le reliquaire de la Sainte larme continua à être adoré, mais le , la municipalité de Vendôme vient à l'abbaye et se fait remettre les reliquaires pour en retirer l'or et les pierres précieuses. Les reliques sont brûlées mais le reliquaire de la Sainte larme n'a été saisie que plus tard comme le montre une lettre datée du 2 messidor an II () indiquant que l'or de ce reliquaire a été envoyé à la Monnaie de Paris le . Cependant le fuseau de cristal contenant la Sainte larme a été recueilli par un sieur Morin puis passa de mains en mains. En 1803, au rétablissement du culte, la relique est remise à Étienne-Alexandre Bernier, évêque d'Orléans qui en fait don au cardinal Caprara, légat du pape en France. Cette relique a été perdue dans son transport de Vendôme à Rome. Achille de Rochambeau remarque que l'Église n'a jamais consacré l'authenticité de cette relique[9].
Palais abbatial
Le logis abbatiale actuel date des XV et XVIe siècle
↑René Crozet, « Le monument de la Sainte Larme à la Trinité de Vendôme », Bulletin Monumental, t. 121, no 2, , p. 171-180 (lire en ligne)
↑Isabelle Isnard, « La Sainte larme de l'abbaye de la Trinité de Vendôme : architecture, décor et mobilier liturgique », Revue Mabillon, t. 81, , p. 173-202 (lire en ligne)
↑Achille de Rochambeau, « Voyage à la Sainte larme de Vendôme », Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire du Vendômois, t. XII, , p. 157-212, 250-292 (lire en ligne)
↑Élu en 1145, confirmé par le roi en 1146, d'après Gallia christiana, t. 8, col. 1370 [1]
↑"Après la mort de l'abbé Jean, le couvent chargea treize commissaires de nommer le nouvel abbé. Ceux-ci élurent l'un d'entre eux, Rainaud, prieur du Saint-Sépulchre de Beaugency" qui résigna ses droits à Rome entre les mains d'Innocent IV. D'après M. Prou, "Additions et corrections au Gallia christiana, tirées des registres d'Honorius IV", In: Mélanges d'archéologie et d'histoire, tome 5, 1885, p. 251-275, ici p. 266. [2]
↑moine, bibliothécaire de l'abbaye, désigné à la charge abbatiale laissée vacante par Rainaud de Beaugency par bulle d'Innocent IV du 25 octobre 1286. Registre d'Innocent IV, 2e année, no 146, f. 168 ; texte latin cité par M. Prou, "Additions et corrections au Gallia christiana, tirées des registres d'Honorius IV", In: Mélanges d'archéologie et d'histoire, tome 5, 1885, p. 251-275, ici p. 266. [3]