L'avenue est créée sur un terrain acquis comme bien national en juillet 1796. Après plusieurs reventes, Charles Picot, propriétaire du terrain délimité par la rue Laval (actuelle rue Victor-Massé), la rue Pigalle et le chemin de ronde de l'enceinte des Fermiers généraux (l'actuel boulevard de Clichy), y ouvre en 1826 une rue au départ de la rue Pigalle. Il lotit le terrain et, après 1839, prolonge la rue jusqu'à la place Pigalle, située à cette date à la limite de Paris. Les maisons sont construites de 1837 à 1839 sur la partie sud de la rue et au début des années 1840 sur la partie située vers la place Pigalle.
Les conventions annexées aux actes de vente ont limité la hauteur des constructions à 11 mètres, prescrit le maintien de jardins en façade et interdit la location de chambres ou d'appartements en garni et le placement d'écriteaux. Les voitures suspendues étaient seules autorisées à y circuler sans pouvoir stationner hors déménagement.
L'avenue Frochot est une voie privée dont l'entrée rue Pigalle est fermée par une grille, celle sur la place Pigalle ayant été condamnée. C'est un îlot de calme, fermé à la circulation dans un quartier très animé. Les belles demeures du XIXe siècle noyées dans la verdure ont attiré les artistes[1],[2].
Bâtiments remarquables et lieux de mémoire
No 1 : maison de style néogothique construite dans les années 1820-1830. L'écrivain Ponson du Terrail (1829-1871) y a habité. Le compositeur Victor Massé y est trouvé mort en 1884[3], de même que, un siècle plus tard, le critique littéraire Matthieu Galey (1986). La chanteuse Sylvie Vartan en a été la propriétaire dans les années 1980, sans jamais y habiter. Selon la légende, cette maison serait hantée par le fantôme d’une servante battue à mort dans les escaliers, à coups de tisonnier, au XIXe siècle. Cette légende serait, indirectement, à l'origine de l'érection de la grille de l'avenue, destinée à protéger les résidents de l'afflux de curieux[4].
No 2 : à gauche de l'entrée donnant sur la place Gabriel-Kaspereit se trouve un grand vitrail de style Art déco à motifs marins inspirés de Hokusai, classé au patrimoine français et qui date des années 1920[5].
No 3 : la cantatrice Régine Crespin (1927-2007) y demeure de 1959 à 2007[3],[6].
No 7 : Alexandre Dumas y résida de 1847 à 1852. Le cinéaste Jean Renoir y habita aussi. Ce fut également le domicile du violoniste et chef d'orchestre Charles Lamoureux[3].
Nos 14 et 15 : atelier du peintre Théodore Chassériau, jouxtant celui de Gustave Moreau et Charles-François Daubigny qui y travailla de 1881 à 1884. Le peintre Toulouse-Lautrec loue l'atelier de Daubigny et y demeure en 1898. Il y meurt trois ans plus tard en 1901[11],[12]. Chassériau y meurt en 1857. Dans ce même bâtiment, le peintre belge Alfred Stevens habite de 1883 à 1893. Au no 15 se trouvait l'Académie Frochot qui devient celle de Jean Metzinger (1883-1956) pour y recevoir les élèves féminines ; elle fut transformée après 1952 en École normale de dessin[13].
↑Jacques Garance et Maud Ratton, Paris méconnu, Éditions Jonglez, 2007, 384 p. (ISBN978-2915-807165).
↑Bruno Centorame, Villas, hameaux et cités de Paris, Paris, Action artistique de la Ville de Paris, , 274 p. (ISBN2-905118-97-0), « Avenue Frochot », p. 106-111.
↑ abc et dBruno Centorame, Avenue Frochot dans Villas, hameaux et cités de Paris, Paris, Action artistique de la Ville de Paris, , 274 p. (ISBN2-905118-97-0), p. 109.
↑Ce dernier y tenait portes ouvertes. Là, elle fit connaissance de tout un peuple d'artistes. Sa première rencontre en 1851 avec Baudelaire eut pour témoins le maître de maison ainsi que Gautier et le sculpteur Jean-Jacques Feuchère. Gautier a décrit dans sa préface à la première édition posthume des Œuvres de Baudelaire, ce premier contact mémorable. Baudelaire vouera longtemps à cette jeune femme ravissante une passion secrète, la considérant comme « son ange gardien ». Elle fut l’une des trois femmes (avec Jeanne Duval et Marie Daubrun) qui lui inspirèrent certains de ses poèmes. On peut distinguer un cycle « Madame Sabatier », au sein du recueil Les Fleurs du mal, notamment les poèmes Que diras-tu ce soir ?, Harmonie du soir, Hymne, À une Madone, Tout entière, Confession, Le Flambeau vivant, Réversibilité, L’Aube spirituelle. Ils devinrent amants le , mais le poète se désintéressa peu à peu d'elle et cessa de la voir vers 1862 (source : baudelaire.litteratura.com). Durant les décennies 1840 et 1850, elle est l'égérie des artistes et poètes modernes sous le surnom de « la Présidente ». Elle tenait salon sur invitation à cette adresse. Alfred Mosselman lui suggéra de recevoir sans invitation le cercle d'amis chaque dimanche. Ces réunions devenant institutionnalisées, il fut décidé, par jeu, qu'elle en serait la présidente. Tous ses admirateurs et soupirants de la surnommer « la Présidente » désormais : Maxime du Camp, Alexandre Dumas père, Ernest Feydeau, Gustave Flaubert, Théophile Gautier, Edmond de Goncourt, Arsène Houssaye, Alfred de Musset, Gérard de Nerval ; les peintres Ernest Meissonnier, Charles Jalabert, Gustave Ricard ; les sculpteurs Auguste Préault et Auguste Clesinger, et puisqu'elle avait appris le chant dès son jeune âge, les musiciens comme Ernest Reyer ou Hector Berlioz. Quant à Meissonier, Ricard, Vincent Vidal, et Jalabert, entre autres, ils firent son portrait en buste ou en pied. Flaubert et Gautier ont écrit des articles sur elle. En 1850, Théophile Gautier lui consacre sa Lettre à la Présidente.
↑ Blandine Bouret, « Mémoires des lieux. Les ateliers du bas-Montmartre. II : autour de la place Pigalle », La Gazette de l'Hôtel Drouot, no 22, 1er juin 2001, p. 44-46.
↑André Roussard, Dictionnaire des peintres à Montmartre, Roissy-en-Brie, Éditions A. Roussard, 1999, 640 p. (ISBN978-2951360105), p. 292.
↑ abcde et fBruno Centorame, Avenue Frochot dans Villas, hameaux et cités de Paris, Paris, Action artistique de la Ville de Paris, , 274 p. (ISBN2-905118-97-0), p. 110.
↑Blandine Bouret, « Mémoires des lieux : les ateliers du bas-Montmartre - II, autour de la place Pigalle », La Gazette de l'Hôtel Drouot, no 22, 1er juin 2001, p. 44-46.
↑André Roussard, Dictionnaire des peintres de Montmartre, p. 216.