La basse fretless (littéralement « sans frettes ») est une basse dont la touche est dépourvu de frettes à l'instar de nombreux instruments à cordes comme le violon, le violoncelle ou la contrebasse. Hormis cette spécificité, une basse fretless possède les mêmes caractéristiques et variante qu'une basse frettée (accordage en quarte mi la ré sol, diapason pouvant aller de 30" à 36", électronique active ou passive, modèles à 4, 5 ou 6 cordes etc.)[1].
Les frettes sont de petites barres métalliques placées perpendiculairement aux cordes et subdivisant chaque touche en demi-tons. Leur absence a plusieurs conséquences :
une infinité des notes possibles (plus de séquençage en demi-tons), la basse fretless n'est plus un instrument tempéré ;
une continuité du son d'une note à une autre lors des glissés (slide), et plus généralement absence de parasites sonores liés aux frettes ;
une certaine chaleur du son (la corde se trouve directement au contact du bois, au lieu de reposer sur le métal des frettes) ;
une difficulté d'apprentissage plus importante : on doit placer le doigt exactement à l'emplacement du manche correspondant à la note, et non pas dans la case délimitée par deux frettes.
Éléments historiques
En 1951, Léo Fender sortait le premier modèle de basse électrique commerciale, la Precision Bass. Ce terme de « Precision » mettait l'accent sur la présence novatrice des frettes par rapport à la contrebasse. En effet, elles permettent d'obtenir facilement la justesse des notes et facilitent le jeu des bassistes par rapport à celui des contrebassistes.
Néanmoins, à la fin des années 1960, certains bassistes (dont notamment Jaco Pastorius) eurent l'idée de « défretter » leur basse, afin de revenir à un son plus proche de la contrebasse — tout en gardant un instrument léger, maniable et électrique. On vit ainsi apparaître les premières basses fretless. C'est donc une sorte de retour en arrière par rapport au concept de Precision défini par Léo Fender. Depuis, un grand nombre de fabricants proposent leurs modèles en version fretless, c'est-à-dire dépourvus de frettes dès le cahier des charges, non après un retrait ultérieur.
Technique
Il est en général plus difficile de jouer sur des basses fretless, car il faut une grande précision dans le doigté et une écoute attentive de la justesse des notes. Avec une basse frettée, on peut appuyer indifféremment (avec un résultat plus ou moins bon) sur n'importe quel endroit de la case délimitée par deux frettes pour obtenir la note juste. À l’inverse, avec une basse fretless on est obligé de poser le doigt de la main gauche exactement à l'emplacement qu'aurait eu la frette correspondant à la note que l'on recherche, comme sur un violon par exemple. En revanche, il devient plus aisé de jouer des sons n'appartenant pas aux gammes usuelles de la musique occidentale, comme les intervalles de quart de ton.
La plupart des basses fretless sont pourvues de repères, soit sur la touche, soit sur la tranche de la touche. Certaines basses fretless dites « lignées » ont également des lignes marquant l'emplacement des frettes, pour guider le bassiste.
Basse fretless Stagg sans lignes.
Basse fretless Squier avec lignes.
L'un des intérêts d'une basse fretless réside précisément dans la possibilité d'altérer les sonorités et, éventuellement, de jouer sur les dissonances légères, par exemple pour faire des effets de trémolo/vibrato en faisant faire de petites oscillations de la main gauche sur la manche dans la direction de la corde[2] (contrairement à un instrument fretté sur lequel les effets de vibrato sont exécutés perpendiculairement à la direction de la corde).
Du point de vue du son, la basse fretless se rapproche de ses ancêtres, le violoncelle et la contrebasse, qui sont, eux aussi, des instruments de basse par principe fretless. Cette similitude est renforcée par l’utilisation de l’ébène pour fabriquer la touche de nombreuses fretless de qualité (ce même bois est utilisé en lutherie classique). Ainsi, la basse fretless possède un son rond, plus chaud, plus mélodieux et beaucoup plus riche en médiums que la basse frettée. Cette différence de spectre sonore avec la basse frettée est attribuée au contact direct entre la corde et le bois qui la fait vibrer à la limite du phénomène de « frise » (la corde étant calée de manière moins nette que sur une frette).