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Elisabeth Schwarzkopf est une musicienne et soprano allemande, naturalisée anglaise, née le à Jarotschin[a] et morte le à Schruns, en Autriche. Elle fut l'une des grandes sopranos du XXe siècle.
Elisabeth Schwarzkopf est considérée comme l'une des plus grandes chanteuses de lieder et est notamment réputée pour ses interprétations d'opérette viennoise, ainsi que des opéras de Mozart, Wagner et Richard Strauss.
Biographie
Jeunesse
Olga Maria Elisabeth Friederike Schwarzkopf naît le 9 décembre 1915 à Jarotschin, près de Posen[1]. Son père, Friedrich, est un instituteur prussien à la mentalité rigide qui lui fait don de son intransigeance et de sa passion pour la langue allemande. Sa mère, née Elisabeth Fröhlich, la gratifie d’une oreille musicale très sûre, d’une volonté de fer, et de son prénom.
Dès l’âge de 10 ans, Elisabeth déchiffre parfaitement les partitions, s’accompagne elle-même au piano et chante souvent dans des concerts amateurs, ce qui lui permet de tenir le rôle-titre de l’Orphée et Eurydice de Gluck dans la production de fin d’année de son école de Magdebourg, en 1928.
Elle n'a pas encore 18 ans lorsque Adolf Hitler arrive au pouvoir en Allemagne. Comme bon nombre de jeunes artistes, elle s’inscrit, dès 1935, au syndicat des étudiants nazis. En 1938, elle demande son adhésion au Parti national-socialiste, mais elle soutiendra plus tard ne pas en avoir reçu la carte[2] — cette initiative lui vaudra d'être surnommée « la diva nazie » par le quotidien américain The New York Times. Mais si on lui offre des rôles plus importants — que ce soit dans l’opérette aussi bien que dans les productions de Richard Strauss —, c’est aussi parce que son talent est déjà exceptionnel.
Richard Strauss la recommande à sa cantatrice fétiche, Maria Ivogün, qui la prend comme élève. En 1942, le chef d’orchestre Karl Böhm l’invite à Vienne, où elle touche un public de connaisseurs dans ses interprétations de lieder, accompagnée par le pianiste Michael Raucheisen[1], avec qui elle réalise ses premiers enregistrements.
En , elle fait entrer La Chauve-Souris de Johann Strauss II au répertoire de l'Opéra de Paris devant un public de sympathisants de l'armée d'occupation. Ce début de carrière est interrompu brutalement par un début de tuberculose qu’elle doit soigner pendant deux ans dans un sanatorium des Monts Tatras, dans le sud de la Pologne, où le GauleiterHans Frank lui fait une cour assidue.
Après la défaite de l’Allemagne, son appartenance au parti nazi et ses liens avec Hans Frank et Joseph Goebbels, ministre de la propagande d’Hitler, lui valent de passer devant le tribunal de dénazification des artistes de Berlin. Ce tribunal l’acquitte, ainsi que bien d’autres artistes, comme son ami le chef d’orchestre Wilhelm Furtwängler. C’est alors que commence une carrière internationale d’une incomparable qualité[3], sous la houlette d’un producteur et directeur artistique anglais, Walter Legge, qui lui fait réaliser ses premiers enregistrements et qu’elle épouse en 1953.
En 1951, elle crée, à Venise, le rôle d’Anne Trulove dans l’opéra The Rake's Progress (La Carrière d'un libertin) d'Igor Stravinsky, sous la direction du compositeur. En 1951, pour le cinquantenaire de la mort de Verdi, elle chante le Requiem, sous la direction de Victor de Sabata. La même année, elle crée Le Triomphe d’Aphrodite de Carl Orff. En 1952, avec Karajan, ce sont les débuts de la Maréchale du Chevalier à la rose, à la Scala de Milan. En 1955, à San Francisco, elle est de nouveau la Maréchale. La même année, elle est Alice Ford dans le Falstaff de Verdi.
En 1957, sous la direction de Tullio Serafin, elle est Liù, (Turandot de Puccini) aux côtés de Maria Callas dans le rôle-titre, pour l'enregistrement studio de cet opéra. Elle ne fait sa première apparition au Metropolitan Opera de New York qu’en 1964, dans Le Chevalier à la Rose, car Rudolf Bing, le directeur du Met, reste longtemps opposé à la venue de certains artistes dont il conteste la « dénazification »[6]. De 1960 à 1967, elle se consacre surtout aux rôles mozartiens, Donna Elvira, la comtesse Almaviva, Fiordiligi, et à ses deux rôles fétiches des opéras de Richard Strauss : la Maréchale du Chevalier à la rose et la comtesse Madeleine de Capriccio. En 1967, elle interprète le Duo des chats de Rossini avec Victoria de los Ángeles.
Durant toute cette carrière consacrée au théâtre lyrique, elle reste fidèle aux lieder de langue allemande, de Mozart à Mahler, en passant par Schubert, Schumann, et donne de nombreux récitals. On notera en particulier tous ceux qu’elle a réalisés avec le pianiste Gerald Moore, ceux chantés avec les sopranos Irmgard Seefried ou Victoria de los Ángeles, la mezzo-soprano Christa Ludwig et le baryton Dietrich Fischer-Dieskau. Parmi ses récitals devenus légendaires : un récital Schubert en 1952 avec Edwin Fischer, un récital Wolf avec Wilhelm Furtwängler au piano en 1953, un récital Mozart en 1956 avec Walter Gieseking, les Quatre derniers Lieder de Richard Strauss avec George Szell en 1965, Des Knaben Wunderhorn de Mahler avec le même Szell en compagnie de Fischer-Dieskau en 1968...
À partir de 1971, elle ne chante plus sur les scènes lyriques. Le 19 mars 1979, son mari Walter Legge, qui vient de subir un infarctus, veut pourtant assister au récital qu’elle donne à Zurich, et meurt trois jours plus tard. Schwarzkopf quitte alors définitivement la scène. Elle consacre à son mari un livre sous forme d’autobiographie, On and Off The Record, qui, curieusement mais avec son assentiment, est traduit en français par La Voix de mon maître. Elle se consacre désormais à l’enseignement et donne, de par le monde, des classes de maître mémorables, notamment à Paris, salle Gaveau. Faite « Dame Commander of the Most Excellent Order of the British Empire (DBE) » par la reine Élisabeth II en 1992, Elisabeth Schwarzkopf décède le , à l'âge de 90 ans, dans la petite ville autrichienne de Schruns, dans le Vorarlberg, où elle vient de s’installer.
Elisabeth Schwarzkopf réalise une mise-en-scène du Chevalier à la rose au théâtre de la Monnaie à Bruxelles, en mai 1981, le rôle de la Maréchale étant tenu par Elisabeth Söderström.
Elle meurt le 3 août 2006 à son domicile de Schruns, en Autriche, à 90 ans. Juste après sa mort, une rumeur infondée fait surface, elle serait la tante du général américain Norman Schwarzkopf. Cette légende a été publiée dans de nombreuses nécrologies[2],[7], alors que, fille unique, Elisabeth Schwarzkopf n'a pas pu avoir de neveu.
(en) Elisabeth Schwarzkopf, On and Off the Record. A Memoir of Walter Legge, Charles Scribner's Sons, New York, 1982, 2e éd. 1988.
(fr) Elisabeth Schwarzkopf, La Voix de mon maître : Walter Legge (traduit de l'anglais par Janine Barry-Delongchamps), Belfond, collection Voix, Paris, septembre 1983, 322 pages (ISBN978-2-71441-627-8), rééditions 1990 (ISBN2-7144-1627-6), 1998, 2003.
↑ a et bLe Nouvel Observateur (avec AP) du 4 août 2006 : Elisabeth Schwarzkopf est morte en Autriche - article intégral [consulté la 13 juin 2010].
↑François Lesueur, Hommage à Elisabeth schwarzkopf, Scènes Magazine, Genève, 1er novembre 2006 : article intégral [consulté le 14 juin 2010].
↑« Il faut féliciter Walter Legge d'avoir provoqué cette rencontre de deux « monstres sacrés » et d'avoir enregistré ce document inestimable réunissant Schwarzkopf et Furtwängler. On se demande, en écoutant, la grande cantatrice, si l'on pourra jamais atteindre de tels sommets dans le naturel et la perfection. Mais la valeur du disque réside peut-être davantage encore dans le document sur le style pianistique de Furtwängler : le modèle absolu de sonorité, de phrasé, d'intelligence avec la partenaire... ». Dictionnaire des disques Diapason : Guide critique de la musique classique enregistrée, Paris, Robert Laffont, , 964 p. (ISBN2-221-50233-7), p. 921.
↑DVD The Art of Conducting : Great Conductors of the Past, Elektra/Wea, .
↑Sir Rudolf Bing, "5000 nuits à L'Opéra" - traduit de l'américain par Henry Muller -, Paris, éditions Robert Laffont, 1972, 1975 (327 p.).
À noter la différence que Sir Rudolf Bing fera entre le retour de Kirsten Flagstad, dont seul le mari collabora avec les nazis, et celui d'Elisabeth Schwarzkopf. Cela montre bien que cette dernière s'était, aux yeux de beaucoup, engagée trop loin dans l'Allemagne nazie. — Voir Schwarkopf, Elisabeth, dans : Fabian Gastellier, L'Opéra, sous la direction de Pierre Brunel, éditions Bordas, 1980.