Né Gheeraedt, ou Geerart Janszoon[1], à Oudewater vers 1450, il semble avoir pris le prénom de son père David comme patronyme peu après son inscription à la guilde des imagiers et selliers de Bruges en 1484[n 1]. Peintre, dessinateur et probablement miniaturiste classifié parmi les primitifs flamands, il est mort à Bruges le .
Originaire d'Oudewater, près de Gouda, il s'inscrit à la corporation des imagiers et selliers de Bruges en tant que franc-maître en 1484. Il est élu second syndic de sa corporation en 1488, puis le , premier syndic, et enfin doyen le . Il entre en 1507 dans la prestigieuse confrérie de Notre-Dame de l'Arbre sec.
Il épouse Cornelia Cnoop, fille du doyen de la guilde des orfèvres. Il peint la Vierge entre les vierges qu'il offre en 1509 aux sœurs Carmélites du couvent de Sion. Aujourd'hui conservé au musée des beaux-arts de Rouen, ce tableau, le seul réellement authentifié, constitue avec le diptyque de la Justice de Cambyse et le Baptême du Christ, le groupe de base utilisé pour constituer par analyse stylistique le corpus des œuvres du maître[2]. L'historien anglais James Weale, établi à Bruges, reconstituera, à la fin du XIXe siècle, l'œuvre du peintre alors tombée dans l'oubli. L'exposition organisée à Bruges en 1902, les Primitifs flamands à Bruges, consacra la redécouverte de Gérard David, en même temps que celles de Jan Provoost, Albert Cornelis et Adriaen Isenbrant.
Gérard David ne figure pas dans les livres de compte de la guilde Saint-Jean des libraires de Bruges, mais il est possible, voire probable, qu'il ait collaboré épisodiquement à l'illustration de différents manuscrits (fig. B et C).
En 1515, un certain « Meester Gheraet van Brugghe », probablement Gérard David, est inscrit comme peintre à la suite de Joachim Patinier sur le registre de la guilde Saint-Luc des peintres d'Anvers. La double inscription était alors courante pour accroître sa clientèle surtout à cette époque troublée qui voyait le déclin de Bruges en même temps que l'essor de la ville d'Anvers favorisée par Maximilien[4].
En 1519-1520, il est cité en justice pour un différend qui l'oppose à Ambrosius Benson, qui travailla quelques années comme compagnon dans son atelier et vécut sous son toit. Lors de son départ, sans doute conflictuel, Benson laissa une malle contenant des dessins de têtes et de nus. Selon lui, quelques-uns de ceux-ci lui venaient d'Adriaen Isenbrant, d'autres d'Albert Cornelis. Soutenant que ces modèles étaient les siens, Gérard David les avait confisqués. Par ailleurs, Ambrosius Benson s'était fortement endetté auprès de son maître. Benson fut condamné à le rembourser en retournant travailler comme compagnon à son atelier trois jours par semaine. Une fois les comptes apurés, la cour des échevins ordonna que Gérard David rendît les modèles confisqués. Passant outre ce jugement, Benson fit emprisonner Gérard David le .
Mort en 1523, il fut enterré sous la tour de Notre-Dame à Bruges.
Style
Dans ses premières peintures (fig. 9 et 2), Gérard David, influencé par l'École de Gand (Jan van Eyck, Joos van Gant, et surtout Hugo van der Goes), emprunte volontiers motifs et figures. Il donne aussi une importance croissante au paysage et au ciel comme composante picturale dramatique.
À partir de 1500, son style évolue avec l'utilisation de modelés plus subtils, de contours plus délicats, et l'emploi du clair-obscur (fig. 6). On note également quelques peintures avec une tonalité générale bleu sombre (fig. 6 et 10).[5]
Après 1506, qui correspond à la livraison du retable de Cervara, son style s'italianise quelque peu avec un perfectionnement technique dans ses perspectives, l'apparition d'un sfumato plus doux, et l'emploi d'effets dramatiques dans l'éclairage (fig. 10).[6]
Après 1510, il peint essentiellement des tableaux de petites dimensions représentant la Vierge à l'Enfant dans un style plus doux, moins hiératique, dans une tonalité plus claire et avec des valeurs moins contrastées (fig. 3). Avec son Repos pendant la fuite en Égypte de Madrid (fig. 4), Gérard David est techniquement au sommet de son art, et la version de Washington (fig. 5) constitue une prouesse technique quant à l'utilisation des glacis.[7]
● La puce violette signale les œuvres attestées ou présumées de Gérard David. ● La puce verte signale les œuvres attribuées à Gérard David et à son atelier. ● La puce orange signale les œuvres attribuées à l'atelier de Gérard David.
Peintures des collections publiques
Classement par lieu de conservation (pays et ville).
Allemagne
●Crucifixion, huile sur bois, 141 × 120 cm, Staatliche Museum preussischer Kulturbesitz, Berlin, inv. 573.[9]
●Saint Christophe, Saint François, Saint Jérôme, et Saint Antoine Abbé, quatre panneaux, huile sur panneaux, 37,5 × 21,5 cm, Staatliche Museum preussischer Kulturbesitz, Berlin, inv. 50.145.9.[10]
●Annonciation, huile sur bois, 44 × 33 cm, Städelsches Kunstinstitut, Francfort, inv. 1095.[11]
●Portrait d'un orfèvre (probablement Jacob Cnoop, beau-père de Gérard David), huile sur bois, 29,7 × 22,5 cm, Kunsthistorisches Museum, Vienne, inv. GG_970.[15]
Belgique
●Soldats et Les Saintes Femmes avec saint Jean, volets gauche et droite d'un triptyque[n 2], huile sur panneaux, 90 × 30,5 cm, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten, Anvers, inv. 179-180.[16]
●Repos pendant la fuite en Égypte, huile sur panneau, 60 × 39 cm, Museo Nacional del Prado, Madrid, inv. P02643 (fig. 3).[22]
États-Unis
●Déploration, huile sur panneau, 55,1 × 62,8 cm, The Art Institute, Chicago, inv. 33.1040.[23]
●Nativité, huile sur panneau, 102,5 × 76 cm, The Cleavland Museum of Art, Cleavland, inv. 1958.320.[24]
●Annonciation, huile sur panneau, 34,8 × 23,3 cm, Detroit Institute of Art, Detroit, inv. 27.201[25]
●Le Christ montrant ses plaies, huile sur panneau, 47,8 × 35,3 cm, The Bob Jones University - The Museum & Gallery at Heritage Green, Greenville, inv. 120.[26]
●Déposition, huile sur toile[n 3], 142,5 × 112,4 cm, Frick Collection, New York, inv. 1915.1.33.[27]
●Crucifixion avec la Vierge, saint Jean, Marie Madeleine et saint Jérôme, huile sur bois, 53,3 × 38,1 cm, Metropolitan Museum of Art, New York, inv. 09.157.[29]
●Nativité, saint Jean Baptiste et saint François, triptyque, huile sur panneaux, centre : 47,6 × 34,3 cm, gauche : 44,1 × 14,9 cm , droit : 44,1 × 15,2 cm, Metropolitan Museum of Art, New York, inv. 32.100.40 A-C.[30]
●Nativité, saint Jérôme et saint Léonard, panneau central et volets intérieurs d'un triptyque[n 4], huile sur panneaux, 89,6 × 71,1 cm et 89,6 × 31,4 cm, Metropolitan Museum of Art, New York, inv. 49.7.20a-b-c.[31]
●Portement de croix et Résurrection, volets intérieurs d'un triptyque[n 5], huile sur panneaux, 87,7 × 29,5 cm et 87,6 × 30 cm, Metropolitan Museum of Art, New York, inv. 1975.1.119.[33]
●Couronnement de la Vierge, huile sur panneau, 70,8 × 54 cm, Norton Simon Museum, Pasadena, inv. F.1965.1.017.P.[35]
●Déploration, panneau central d'un triptyque[n 7], huile sur panneau, 87 × 65,1 cm, Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, inv. 328 (fig. 4).[36]
●Tête du Christ, huile sur panneau, 46 × 33,6 cm, Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, inv. 330.[37]
●Vierge à l'Enfant trônant avec deux anges, huile sur panneau, 99,2 × 65,2 cm, Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, inv. 319.[38]
●Annonciation, huile sur panneau, tondo Ø 27,9 cm, Art Museum, St. Louis, inv. 204:1942.[39]
●Lamentation, huile sur panneau, 39,4 × 31,7 cm, The Fine Arts Collections of the Art, Design & Architecture Museum - University of California, Santa Barbara, inv. 1960.4.[40]
●Repos pendant la fuite en Égypte, huile sur panneau, 44,3 × 44,9 cm, National Gallery of Art, Washington, inv. 1937.1.43 (fig. 5).[41]
●Christ bénissant, huile sur bois, 118 × 61 cm, National Gallery of Ireland, Dublin, inv. 13.[48]
Italie
●Intronisation de la Vierge et de l'Enfant entre saint Jérôme et saint Benoît, panneau central, volet gauche et volet droit du polyptyque de la Cervara, huile sur panneaux, 151 × 87 cm ; 148 × 67 cm, Palazzo Bianco, Gênes, inv. 12.[49]
●Crucifixion avec la Vierge et saint Jean, huile sur panneau, 102 × 89 cm, Palazzo Bianco, Gênes, inv. 19.[50]
●Vierge à la soupe au lait (Madonna della pappa), huile sur panneau, 41 × 32 cm, Palazzo Bianco, Gênes, inv. 18 (fig. 7).[51]
●Le Christ cloué sur la croix, panneau central d'un triptyque[n 10], huile sur bois de chêne, 49,4 × 95,1 cm, National Gallery, Londres, inv. NG3067 (fig. 9).[56]
●Mariage mystique de sainte Catherine, huile sur bois de chêne, 105,8 × 144,4 cm, National Gallery, Londres, inv. NG1432 (fig. 10).[57]
●Bernardin de Salviatis et trois saints, huile sur bois, 103,4 × 94,3 cm, National Gallery, Londres, inv. NG1045.[58]
●Portrait d'un ecclésiastique en prière, huile sur bois, 34,2 × 26,8 cm, National Gallery, Londres, inv. NG710.[59]
●Saint Jérôme, huile sur panneau de chêne, 35,3 × 23,7 cm, National Gallery, Londres, inv. NG2596.[60]
●Christ faisant ses adieux à sa Mère et Vierge avec deux anges, diptyque, détrempe vernie sur bois de chêne, 11,5 × 9 cm, Kunstmuseum, Bâle, inv. G.1958.15 et G.1958.16.[62]
Dessins des collections publiques
Dessins attribués à Gérard David ou à un membre de son atelier.
Allemagne
Tête de femme et homme (recto), homme debout (verso), encre brune sur papier, 128 × 92 mm, Städelsches Kunstinstitut, Francfort, inv. 6916.[63]
Canada
Quatre têtes, pointe de métal sur papier, 72 × 63 mm, Musée de Beaux-Arts du Canada, Ottawa, inv. 6986.[64]
France
Jeune fille debout, encre brune sur papier, 91 × 60 mm, Musée du Louvre, Paris, inv. 170DR.[65]
Étude de quatre têtes de femmes et de deux mains (recto), tête d'homme (verso), encre brune sur papier, 89 × 97 mm, Musée du Louvre, Paris, inv. 3812.[66]
Jeune fille assise de trois quarts, pointe d'argent sur papier, 95 × 65 mm, Musée du Louvre, Paris, inv. RF 20.649.[67]
Étude d'une tête (recto), étude de mains (verso), pointe d'argent sur papier, 93 × 65 mm, Musée du Louvre, Paris, inv. 20652.[68]
Pologne
Étude de têtes, pointe d'argent sur papier, 94 × 97 mm, Musée Czartoryski, Cracovie, inv. XV-Rr.1970 (fig. A).[69]
Tête de femme (recto), étude d'une tête d'homme et d'un arbre (verso), pointe d'argent sur papier, 142 × 102 mm, Kunsthalle, Hambourg, inv. 21575.[70]
Miniatures attribuées à Gérard David
Virgo inter Virgines, vélin, 180 × 134 mm, The Pierpont Morgan Library, New York, inv. Ms. M.659 (fig. B).[71]
Vierge à l'Enfant sur un croissant de lune, Sainte Catherine et Sainte Claire, f.197v, f.228v et f.230v du Livre de prières Rothschild, collection particulière, localisation inconnue (fig. C).[72]
C. Vierge à l'Enfant sur un croissant de lune, f.197v du Livre de prières Rothschild. collection particulière.
Notes et références
Notes
↑Aux Pays-Bas, la prononciation de son prénom varie sensiblement selon les régions. En utilisant l'alphabet phonétique international (IPA), on note au Noord-Nederland : /ˈχɪː.rɑrt/, au Vlaanderen, Brabant : /ˈɣeː.rɑrt/, et au Limburg : /ˈɣeː.rɑrd/. Cf. Wiktionary NL.. Francisé en Gérard David, cet artiste est parfois aussi appelé Gerard van Oudewater ou Gerard de Bruges.
↑Pour le panneau central, voir Royaune-Uni : Le Christ cloué sur la croix.
↑C'est peut-être l'huile sur toile la plus ancienne des œuvres néerlandaises connues.
↑Pour les volets extérieurs, voir Pays-Bas : Vue sylvestre.
↑Pour le panneau central, voir Déploration ; pour les volets extérieurs, voir Annonciation.
↑Pour le panneau central, voir : Déploration ; pour les volets intérieurs, voir : Portement de croix et Résurrection.
↑Pour les volets, voir : Portement de croix, Résurrection et Annonciation.
↑Ce panneau constitue sans doute un diptyque avec celui représentant une Lamentation conservé dans le même musée.
↑Ce panneau constitue sans doute un diptyque avec celui représentant l'Adoration des Mages conservé dans le même musée.
↑Pour les autres éléments de ce triptyque, voir Belgique : Soldats et Les Saintes femmes avec saint Jean.