Dans la Chambre du Cerf du Palais des papes d'Avignon, Guillaume II Roger et son fils Guillaume III chassent au faucon.
Titre
Seigneur de Rosiers-d'Égleton, de Margeride, de Saint-Exupéry-les-Roches, de Fay, de Combrailles et de Cornillon Baron de Saint-Rémy-de-Provence, de Pertuis de Meyrargues et de Séderon
Devenu cardinal en 1338, Pierre fut élu pape, à Avignon, le , sous le nom de Clément VI. Le , Philippe de Valois accorda 1 000 livres de rente à Guillaume II Roger sur les comtés du Maine et d’Anjou. Le frère du pape se vit attribuer, la même année, le fief de Beaufort. Jean duc de Normandie, comte d'Anjou et du Maine, ayant transformé ce fief en vicomté en 1344, Guillaume fit restaurer le château dès 1345. Puis la faveur royale en fit un comté en 1347, tout en exemptant de chevauchée le nouveau comte[1].
Le , Raymond de Chambarlhac de Lherm, damoiseau, rendit hommage à Guillaume II Roger, comte de Beaufort, dont il était le vassal dans la baronnie de Fay[8].
À la mort de son frère le cardinal Hugues Roger en automne 1362, Guillaume, par héritage, se vit attribuer la baronnie de Bagnols-sur-Cèze et le comté d’Alès[6].
En 1353, la reine Jeanne, considérant « les avantages importants et nombreux que nous a procuré, dans des moments critiques pour nous, le zèle charitable et paternel du Très Saint Père dans le Christ, le Seigneur Clément, nous fait étendre jusqu’aux siens toute notre reconnaissance et toute notre bonté et nous les font récompenser chaleureusement par nos largesses », offrit contre hommage de Guillaume II et de façon inaliénable, Saint-Rémy, Pertuis, Meyrargues, les Pennes et Séderon[10].
D’emblée, la cession de Saint-Rémy posa problème. Le , par lettre, la reine Jeanne ordonnait aux Saint-Rémidois de rendre hommage à Guillaume II. Cinq jours plus tard, elle étendit la portée de sa donation aux droits régaliens et de justice des premières appellations sur le castrum et ses appartenances. Le , la reine écrivit au Sénéchal Foulques d'Agoult pour le presser à mettre ses lettres en application. Trois jours après, elle signait une lettre adressée aux communautés qui devenaient vassales de Guillaume II, ainsi qu’aux habitants d’Aix et de Tarascon, pour leur signifier et confirmer ses donations aux Roger de Beaufort[11].
Au cours du mois de mars 1371, Guillaume II fit définitivement enregistrer par la Cour des Comptes d'Aix les lettres de confirmation de la donation de Saint-Rémy par la reine Jeanne[12].
Guillaume II fait de Guillaume III son héritier universel
L'émancipation de son fils aîné Guillaume III Roger fut effective le . Il léguait à son « fils bien-aimé », l'ensemble de son patrimoine limousin, avec le fief et le titre de comte de Beaufort, d'une part, ainsi que ses fiefs d'Auvergne contigus au Limousin, et la moitié de ses terres dans les comtés de Provence et Forcalquier, selon la partition faite par notre seigneur le pape[N 2].
Guerres de Guillaume II Roger
Il participa à la bataille de Poitiers, en 1356, et fut fait prisonnier à rançon. Le résultat immédiat fut de faire sortir des ordres son cadet Nicolas Roger de Beaufort. Relever son fils de ses vœux et réunir sa rançon fut l'œuvre des cardinaux de la famille.
Molinier dans son Histoire du Languedoc signalait une lettre de 1376, dans laquelle Guillaume II Roger de Beaufort s'élevait contre les menées pro-anglaises de Bernard Pelet, coseigneur d'Alès, dans son comté. Il était aidé par un agent anglais, Pierre de Galard, connu en Cévennes sous le diminutif de Perrot et qualifié de gros et méchant[13].
Verfeil, dans la vallée de la Seye, fut acheté par Guillaume II, comte de Beaufort, le , lors de l'émancipation de son fils Raymond, vicomte de Valernes[N 3].
Mariages
1° Marié en 1325 à Marie de Chambon, elle lui donna dix enfants[N 4], dont :
Nicolas (1340-1415), seigneur de Limeuil du chef de sa 1re femme Marguerite de Galard, et souche de la deuxième branche des Roger de Beaufort vicomtes de Turenne, après celle issue de son aîné Guillaume III : cette branche se fondra dans les La Tourd'O(l)liergues, leur transmettant la vicomté de Turenne : voir plus bas. En effet, les vicomtes de Turenne issus de Guillaume III Roger de Beaufort courent jusqu'à sa petite-fille Antoinette, morte en 1416, épouse de Boucicaut ; la postérité de Nicolas succède alors à la vicomté de Turenne (lui-même, d'ailleurs, semble avoir porté aussi le titre) : < son fils le vicomte Pierre (né du 2e mariage de Nicolas avec Ma(r)the de Montaut-Mussidan ; marié lui-même en 1432 à Blanche de Gimel ; Marguerite Roger de Beaufort, une sœur de Pierre, épouse en 1423 Bertrand II de La Tour d'Oliergues : parents d'Anet IV ci-après) < Pierre et Blanche de Gimel sont les parents de - Catherine Roger de Beaufort dame de Charlus (x Louis comte de Ventadour), et de la vicomtesse - Anne Roger de Beaufort, qui marie son cousin germain Agnet/Anet/Annet IVde La Tourd'Oliergues : d'où la suite des vicomtes de Turenne de la maison de La Tour d'Olliergues (qui prendra ensuite le nom de La Tour d'Auvergne par le mariage du vicomte François II de La Tour d'Oliergues : voir plus bas), dont Henri duc de Bouillon et son fils le maréchal de Turenne ;
Delphine/Dauphine, x Huguesde La Roche : leur fille Marthe de La Roche épouse Louis baron prince de Montboissier : grands-parents de Jean III de Montboissier ci-dessous ;
2° Sa seconde épouse fut Guérine de Canillac, avec laquelle il convola en 1345. Le couple eut deux enfants, - Jeanne (épouse sans postérité de Louis, comte de Forez en 1358-1362), et :
Marquis/Marquès/Marc Rog(i)er qui reprit le nom de Canillac, d'où les Beaufort-Canillac fondus dans les Montboissier par le mariage en 1459 de sa petite-fille Isabelle/Isabeau Roger de Beaufort-Canillac (fille de Louis Roger de Canillac) avec Jean III de Montboissier (à Brousse et Cunlhat) ci-dessus : parents de Jean IV de Montboissier, père lui-même de Jacques de Montboissier. Marquès Roger de Beaufort épousa 1reCatherine d'Auvergne, puis 2e Eléonore d'Anduze.
Ladite Isabelle/Isabeau Roger de Canillac était fille de Jeanne de Norry et Louis Roger de Canillac — lui-même fils de Marquis/Marquès Roger de Beaufort-Canillac qu'on vient de citer et d'Eléonore d'Anduze — et elle avait toute une fratrie, dont :
Marquis/Marquès/Marc Roger de Canillac comte d'Alès, vicomte de Lamothe et baron princed'Anduze, x 1469 Jeanne, fille d'Antoine de Chabannes-Dammartin. Sans postérité : son frère Jacques hérite.
et Jacques Roger de Canillac, mort en 1513, lui-même sans postérité de son union avec Jacqueline de Créqui, fille de Jean V de Créquy et petite-fille maternelle du comte Bertrand Ier d'Auvergne : par son testament de 1511 il légua ses biens à ses neveu et petit-neveu Jean IV et Jacques de Montboissier, à charge pour eux de relever le nom et les armes des Beaufort-Canillac. Guérine de Canillac mourut en 1359[1].
3° Son troisième mariage, en 1368, se fit avec Catherine d'Adhémar. Guillaume était alors âgé de cinquante-trois ans. Son épouse, née en 1336, était la fille de Doulceline Gaucelin de Graveson et de Lambert d'Adhémar, sire de Monteil, et sœur de Hugues, seigneur de la Garde, l’ancien Sénéchal de Beaucaire. Ces Adhémar étaient une branche de la famille comtale desPoitiers-Valentinois. Il eut d'elle un seul fils, - Raymond Rogier de Beaufort, qui hérita de la vicomté de Valernes et de Cornillon[1].
Testament
Le comte de Beaufort rédigea son testament le , au château de Cornillon, où il s'est retiré[1].
: À Cornillon, Guillaume II, qui avait fait l’acquisition de la ville de Verfeil, près de Saint-Antonin-Noble-Val, émancipa son dernier fils Raymond, unique enfant issu de son troisième mariage contacté, en 1363, avec Catherine de la Garde, sœur d’Hugues Adhémar, seigneur de Monteil et de la Garde. Le jeune garçon reçut de son père la moitié de la vicomté de Valernes et tous les fiefs qui en dépendaient avec leurs revenus, bénéfices et cens y afférents. Le comte de Beaufort y ajouta le château de Saint-Rémy et celui de la Tour (tour du Cardinal ou de Canillac) qui le jouxtait avec tous les droits de cette seigneurie[6].
Il se vit en outre remettre les châteaux de Margerides et de Saint-Exupéry-les-Roches, au diocèse de Limoges, celui de Cornillon, au diocèse d’Uzès, ainsi qu’une propriété comportant habitations et jardins à Villeneuve, près d’Avignon. À cette partie immobilière étaient jointes des armes, des chevaux, des meubles, des services pour la table, de la vaisselle en argent blanc ou doré, ainsi que tout le matériel de cave du château de Cornillon et des exploitations viticoles de Vérune et Saint-Mabille qui en dépendaient[6].
Se sentant déjà à l'article de la mort, le dimanche 16 et lundi Guillaume II Roger, comte de Beaufort, avait repris son testament du pour y ajouter deux codicilles. Son fils aîné, Guillaume III était désigné comme son exécuteur testamentaire et son cadet Roger héritait du titre de comte de Beaufort. Il mourut à la fin du mois de .
L'abbé Papon l’a publié sur huit pages et demie dans sa Chorographie (tirée de son Histoire générale de Provence dédiée aux Etats, 1777) et il en parle comme d’un inventaire curieux. Le comte de Beaufort avait transformé la chapelle castrale de Cornillon en véritable salle au trésor. Parmi toutes les richesses entreposées, se trouvaient trente-six cuillères en argent ainsi que deux cent quarante et un ustensiles d’argenterie allant des plats aux aiguières en passant par les plats à barbe et un coquemar (bouilloire à anses). L’orfèvrerie comptait soixante-dix pièces en argent doré comprenant des pots, des plats, des aiguières, des tasses, des coupes, des gobelets ainsi qu’un drageoir et un vase à épices[N 5]. Selon Papon, il y avait aussi des boîtes à parfum et à musc, un crucifix orné de perles et de pierres précieuses au pied duquel se tenaient les apôtres Pierre, Jean et Paul. Se trouvaient encore deux reliquaires d’argent doré, dont le premier renfermait un morceau de la croix de saint André et le second des ossements de saint Thomas, ainsi que des objets cultuels en or et en argent dont une dizaine d’anneaux épiscopaux ayant appartenu à Pierre Roger. S’y ajoutaient des patènes et des ciboires en or, des burettes en argent, des croix pectorales en or et en argent rehaussées de pierreries, des bagues et des anneaux d’or ornés de rubis, de saphirs et de pierres fines ainsi que des perles et des pierres précieuses en vrac. Les Roger de Beaufort avaient aussi conservé des prises de guerre dont quatre mille oboles aragonaises, des gobelets aux armes de Navarre et de Flandre, ainsi que deux coupes faites en travail anglais dont une coupe dorée et une grande coupe d’argent doré. Soit une estimation de cent trente neuf mille sept cent soixante-dix (139 770) livres tournois[6].
Notes et références
Notes
↑Aurouze et Saint-Martial se trouvent de nos jours dans le Cantal ; Chanteuges et Langeac, dans la Haute-Loire ; Aubusson, Monton, Pont-du-Château et Veyre-Monton dans le Puy-de-Dôme
↑Les archives départementales des Bouches-du-Rhône ont conservé la lettre d'émancipation, sous la côte B 1431, f° 37 r°. Dans une lettre datée du 24 novembre 1349, le père signifiait à son fils : « Fili carissime, quia hodie fuerat terminus impressus et assignatus ad eligendi duas partes terrarum et locorum meorum immobilium per dominum nostrum papam (…) ideo, eligi totum patrimonium meum Lemovicinum ubi natus sum cum titulo et terra mea de Belloforti, pro una parte, et quia terra Alvernie contigua est Lemovicino ideoque pro alia parte elegi dictam terram meam Alvernie cum terra de Folhnel et Armaniaci ac medietate terrarum que sunt in comitatibus Provincie et Forcalquerii et universaliter citra Rodanum iuxta divisionem factam per dominum nostrum papam. Datum Avinione, satis tarde, die Sabbati XXVIII mensis novembris Anno Domini M°CCC°XLIX »
↑Acte enregistré à Cornillon, dans le diocèse d’Uzès
↑Dix enfants dont Guillaume III, né en 1326, émancipé en 1349, Pierre, futur Grégoire XI, né en 1329, Roger, né en 1342, émancipé en 1360 (il a 18 ans), Jean et Nicolas.
↑Il n’est pas inutile de comparer cette argenterie avec celle qui, en 1390, agrémentait la table de François de Conzié, un des plus somptueux prélats de la Cour pontificale d’Avignon. Il possédait deux salières, huit coules, cinq brocs, deux carafes, vingt-cinq pichets, six tranchoirs, douze plats, neuf pots, seize gobelets, cinquante-trois aiguières, cent trois tasses et cent douze écuelles
↑Francisque Micolon, Un frère de Clément VI : Guillaume Roger de Beaufort, vicomte de Lamothe, Almanach de Brioude et de son arrondissement vol. 17, 1936, p. 45.
Régis Veydarier, Raymond de Turenne, la deuxième maison d’Anjou et de Provence : étude d’une rébellion nobiliaire à la fin du Moyen Âge, thèse de l’Université de Montréal (Québec) 1994.