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Hans Filbinger

Hans Filbinger
Illustration.
Hans Filbinger, en 1978.
Fonctions
Président du Conseil fédéral ouest-allemand

(11 mois et 30 jours)
Prédécesseur Alfons Goppel
Successeur Alfred Kubel
Vice-président fédéral
de l'Union chrétienne-démocrate d'Allemagne

(5 ans, 9 mois et 13 jours)
Président Helmut Kohl
Ministre-président de Bade-Wurtemberg

(11 ans, 8 mois et 14 jours)
Gouvernement Filbinger I, II, III et IV
Coalition CDU-SPD (1966-1972)
CDU (1972-1978)
Prédécesseur Kurt Georg Kiesinger
Successeur Lothar Späth
Ministre de l'Intérieur

(6 ans, 5 mois et 23 jours)
Ministre-président Kurt Georg Kiesinger
Gouvernement Kiesinger II et III
Prédécesseur Viktor Renner
Successeur Walter Krause
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Mannheim (Allemagne)
Date de décès (à 93 ans)
Lieu de décès Fribourg-en-Brisgau (Allemagne)
Parti politique CDU
Diplômé de Université de Fribourg-en-Brisgau
Université Louis-et-Maximilien de Munich
Profession Juriste

Hans Filbinger
Ministres-présidents du Bade-Wurtemberg
Ministres de l'Intérieur du Bade-Wurtemberg

Hans Karl Filbinger, né le à Mannheim et mort le à Fribourg-en-Brisgau, est un juriste et homme politique allemand membre de l’Union chrétienne-démocrate (CDU).

Il est ministre-président de Bade-Wurtemberg de 1966 à 1978, d’abord à la tête d’une grande coalition CDU-SPD, puis uniquement avec la CDU qui obtient une majorité absolue lors de deux élections consécutives. Il mène notamment l’abolition de l’école confessionnelle, ainsi qu’une importante réforme de l’administration territoriale de la région qui lui vaut d’être qualifié d’« architecte de l’unité du Bade-Wurtemberg ». Il doit démissionner en 1978 à la suite de la révélation de son rôle dans une condamnation à mort dans la Kriegsmarine tout à la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce qu’il a longtemps démenti.

Il fut l’un des sept vice-présidents fédéraux de la CDU et jusqu’à sa mort président d’honneur de la fédération CDU du Bade-Wurtemberg. Il assure également de à la présidence du Bundesrat.

Origines, famille et formation

Hans Filbinger naît le à Mannheim. Il fait des études de droit et de sciences économiques à l’université de Fribourg-en-Brisgau et l’université de Munich, et obtient son doctorat en 1939. Il enseigne ensuite à l’université de Fribourg.

Pendant ses études secondaires, Filbinger entre à l’association d’écoliers et d’étudiants catholiques Neudeutschland, proche du Zentrum. Neudeutschland refusant d’être intégré aux Jeunesses hitlériennes, le Troisième Reich limite strictement son champ d’action, avant de l’interdire complètement en 1939. Filbinger, qui était l’un des dirigeants pour le district de Bade-du-Nord, appelle en ses camarades à continuer leurs activités et formule un programme pour la période à venir[1].

Filbinger, dont le père est chômeur, reçoit une bourse de la Fondation universitaires du peuple allemand[2].

Il est de 1934 à 1937 membre de la Sturmabteilung (SA), et de 1933 à 1936 de l’Association allemande des étudiants nationaux-socialistes (Nationalsozialistischer Deutscher Studentenbund, NSDStB). En 1935, il publie dans une revue estudiantine catholique un essai endossant certaines conceptions idéologiques nazies en matière de communauté nationale et de race[3].

Marié à Ingeborg Breuer, il a quatre filles et un garçon.

Carrière juridique et militaire

En , le procureur général Emil Brettle avertit Filbinger, qui se présente au premier examen d’État (erstes Staatsexam), qu’il ne pourra être accepté au deuxième examen avant d’avoir clarifié sa situation politique vis-à-vis du régime[4]. Risquant d’être écarté du deuxième examen et de voir sa carrière bloquée, il adhère au printemps au parti nazi, et commence le service de préparation des futurs employés de l’État.

En 1940, il est enrôlé dans la Kriegsmarine, où il atteindra en 1943 le grade d’enseigne supérieur (Oberfähnrich zur See). Avant d’avoir pu être promu lieutenant, il est affecté à la justice militaire – contre sa volonté, déclarera-t-il par la suite. Il a par deux fois tenté d’éviter cette affectation en se portant volontaire pour intégrer les forces sous-marines[5]. Il est fait prisonnier de guerre des troupes britanniques en Norvège.

Il exerce après la guerre la profession d’avocat à Fribourg et y reprend ses travaux universitaires.

Carrière politique

Débuts

Filbinger adhère à l’Union chrétienne-démocrate (CDU) en 1951 et devient conseiller municipal de Fribourg en 1953.

Il entre en 1958 dans le gouvernement régional en tant que conseiller d’État[6] chargé de représenter les intérêts de la Bade-du-Sud dans le jeune Land de Bade-Wurtemberg, constitué en 1952.

Ministre de l’Intérieur

En 1960, il est nommé ministre régional de l’Intérieur, et peu après élu au Landtag de Bade-Wurtemberg, dont il resta membre jusqu’en 1980 ; il représentera jusqu’en 1976 la circonscription de Freiburg-Stadt, et ensuite celle de Freiburg I.

Il devient en 1966 président de la fédération CDU de Bade-du-Sud.

Ministre-président

Filbinger devient ministre-président de Bade-Wurtemberg en , succédant à Kurt Georg Kiesinger devenu chancelier fédéral. Les libéraux-démocrates quittent alors le gouvernement régional, projetant au une alliance avec les sociaux-démocrates. Après des négociations difficiles, Filbinger forme une grande coalition CDU-SPD, à l’exemple du cabinet Kiesinger au plan fédéral. La majorité abolit l'année suivante l'école confessionnelle, puis se reforme après les élections de 1968.

Carte des trois Länder du Sud-Ouest de 1945 à 1952, formant aujourd’hui le Bade-Wurtemberg. Ils ont été créés entre 1945 et 1947 par les autorités d’occupation françaises : en bleu le Wurtemberg-Bade, composé de la partie nord de la Bade historique et de la partie nord du Wurtemberg ; en rouge le Wurtemberg-Hohenzollern, créé en 1945 avec la partie sud du Wurtemberg et de l’ancienne région prussienne de Hohenzollern ; en jaune, la Bade, fondée en 1947 et correspondant au seul Sud de la région historique de même nom. Ces trois Länder ont fusionné le pour donner naissance au Bade-Wurtemberg.

La principale réalisation de la grande coalition au début des années 1970 est la réforme de l’administration territoriale du Land (communes et arrondissements), préparée par Walter Krause, le ministre social-démocrate de l’Intérieur. Cette réforme voit la fusion de communes et d’arrondissement afin d’améliorer la cohérence du découpage territorial. Certaines des nouvelles unités transcendent les frontières historiques de la Bade et du Wurtemberg. Les deux régions historiques n’ont été réunies qu’en 1952 et les oppositions au nouveau Land sont restées fortes en Bade. En 1970, la grande coalition organise un référendum visant à faire confirmer celui de 1951 sur la fusion des Länder, après que le Tribunal constitutionnel fédéral a en 1956 puis en 1969 jugé que le référendum était légal mais que la volonté des Badois n’a pas pu s'exprimer ; les électeurs approuvent la fusion à un large majorité. Filbinger œuvre également à la fusion des fédérations CDU de Bade-du-Sud, de Bade-du-Nord, de Wurtemberg-du-Nord et de Wurtemberg-Hohenzollern, qui s’étaient maintenues malgré la création du Land, en une fédération CDU de Bade-Wurtemberg ; il en est élu président en . Sa politique de rapprochement des anciens Länder lui vaudra d’être qualifié d’« architecte de l’unité du Bade-Wurtemberg ».

Lors des élections du 23 avril 1972, la CDU remporte, pour la première fois dans l’histoire du Land, une majorité absolue avec 52,9 % des suffrages, et forme seule le gouvernement. Aux élections de 1976, où Filbinger mène la campagne chrétienne-démocrate avec le slogan « La liberté ou le socialisme » (« Freiheit oder Sozialismus »), sa popularité croissante lui permet de donner à la CDU une majorité de 56,7 %[7].

Il assure du au la présidence, tournante, du Bundesrat.

À la fin des années 1970, Filbinger tente sans succès de mettre en œuvre la construction de la centrale nucléaire de Wyhl, contre laquelle se mobilisent les mouvements écologistes et alternatifs. Il condamne le radicalisme de l’extrême-gauche dans les milieux politiques et universitaires, et lors de la vague terroriste de 1977 connue sous le nom d’« Automne allemand », son gouvernement prononce la dissolution des Verfasste Studentenschaft. Il s’oppose à l’introduction d’un système unique d’enseignement et renforce en Bade-Wurtemberg le système ternaire traditionnel (Hauptschule, Realschule, Gymnasium).

Personnalité très populaire dans l’Allemagne des années 1970, Filbinger entre à la présidence fédérale de la CDU et devient l’un de ses sept vice-présidents fédéraux, et sa candidature est envisagée pour l’élection présidentielle de 1979. Le Bade-Wurtemberg fait sous son gouvernement figure d’État politiquement et économiquement stable et est montré en exemple par la CDU. Mais sa carrière prend brusquement fin en 1978 lorsqu’éclate le scandale autour de ses actes de juge dans la Kriegsmarine à la fin de la Seconde Guerre mondiale ; le , il démissionne de ses fonctions de ministre-président de Bade-Wurtemberg.

Retraite politique

Le successeur de Filbinger à la tête du gouvernement régional est Lothar Späth, qui l’emporte contre le maire de Stuttgart Manfred Rommel. Filbinger quitte fin la présidence de la fédération CDU de Bade-Wurtemberg, où Lothar Späth lui succède également, et le poste de vice-président fédéral de la CDU ; il est élu cette même année président d’honneur de la fédération de Bade-Wurtemberg et conservera cette fonction jusqu’à sa mort. Il ne se représente pas lors des élections de 1980, et reste jusqu’en 1981 membre de la présidence fédérale de la CDU.

L’affaire Filbinger

Vie après la politique

Vue du château de Weikersheim

En 1979, Filbinger est l’un des fondateurs du Centre d’études de Weikersheim (Studienzentrum Weikersheim), un think tank qu’il dirige au château de Weikersheim jusqu’en 1997 avant d’en devenir président d’honneur.

En 1987, il publie ses mémoires, Die geschmähte Generation (La Génération vilipendée), dans lesquels il maintient sa défense contre les attaques dont il est l’objet.

La controverse née en 1978 ne s’est jamais éteinte. Le , le lendemain du quatre-vingt-dixième anniversaire de Filbinger, une réception en son honneur a lieu à la résidence de Ludwigsbourg en présence de cent trente personnes environ, parmi lesquelles les principaux dirigeants de la CDU et du FDP, la plupart des membres du gouvernement régional, et ses successeurs à la tête du Bade-Wurtemberg Erwin Teufel et Lothar Späth. Une manifestation a lieu devant le château ; des protestations avaient déjà empêché une réception prévue à Fribourg.

En , Filbinger est élu par le Landtag de Bade-Wurtemberg parmi les délégués pour l’élection du président fédéral ; il avait déjà été fait partie de l’Assemblée fédérale en 1959, 1969, 1974, 1994 et 1999. Dans la semaine précédant l’élection, sa présence est critiquée par le Parti social-démocrate, le Parti du socialisme démocratique, Alliance 90 / Les Verts, le PEN Club et le Conseil central des Juifs en Allemagne en raison de son passé, et les directions fédérales sociales-démocrate et verte se dissocient de la décision de leurs groupes parlementaires de Bade-Wurtemberg.

Filbinger meurt le . Günther Oettinger, ministre-président de Bade-Wurtemberg, fait mettre le drapeau en berne sur les bâtiments publics de la région[8]. Le , un requiem est donné en sa mémoire dans le cadre d’une cérémonie officielle à la cathédrale de Fribourg. Y assistent quelque sept cents personnes, parmi lesquelles ses successeurs à la tête du Land Lothar Späth, Erwin Teufel et Günther Oettinger, le ministre fédéral de l’Intérieur Wolfgang Schäuble et le président du groupe CDU/CSU au Bundestag Volker Kauder. Son éloge funèbre par Günther Oettinger, dans lequel celui-ci déclare notamment qu’« Hans Filbinger n’a pas été national-socialiste » et qu’« il n’existe aucun jugement d’Hans Filbinger en exécution duquel un homme aurait perdu la vie »[9], suscite des critiques de la part du Conseil central des Juifs en Allemagne et d’autres associations[10].

Il est inhumé au Cimetière de Liebfrauenkirche à Fribourg-Günterstal.

Publications

  • Die geschmähte Generation. Politische Erinnerungen. Die Wahrheit aus den Stasi-Akten (1987), 3e édition augmentée et remaniée, Bechtle-Verlag, Esslingen, 1994 (ISBN 3-762805-23-7)

Distinctions

Décorations
Titres universitaires

Ressources

Bibliographie

  • (de) Günther Gillessen, « Der Fall Filbinger. Ein Rückblick auf die Kampagne und die historischen Fakten », dans Die Politische Meinung. Monatszeitschrift zu Fragen der Zeit (ISSN 0032-3446), no 408, , p. 67–74 [lire en ligne]
  • (de) Heinz Hürten, Wolfgang Jäger et Hugo Ott, Hans Filbinger, der "Fall" und die Fakten : eine historische und politologische Analyse, Mainz, V. Hase und Koehler, , 179 p. (ISBN 3-7758-1002-1)
  • (de) Helmut Kramer (direction), Recht ist, was den Waffen nützt : Justiz und Pazifismus im 20. Jahrhundert, Berlin, Aufbau-Verlag, (ISBN 3-351-02578-5), p. 43
  • (de) Franz Neubauer, Das öffentliche Fehlurteil : der Fall Filbinger als ein Fall der Meinungsmacher, Regensburg, Roderer, , 418 p. (ISBN 3-89073-487-1)
  • (de) Fred Sepaintner (direction), Hans Filbinger : aus neun Jahrzehnten, Leinfelden-Echterdingen, DRW-Verlag, (ISBN 3-87181-536-5)
  • (de) Wolfram Wette (direction), Filbinger, eine deutsche Karriere, Springe, Zu Klampen, , 191 p. (ISBN 3-934920-74-8, lire en ligne)

Notes

  1. Une reproduction du document est disponible en ligne à l’adresse http://www.hans-filbinger.de/images/gaubrief.gif.
  2. (de) Hugo Ott, dans Hürten, Jäger, Ott 1980, p. 15 et suivantes
  3. (de) Wolfram Wette, Der Fall Filbinger, p. 5 [lire en ligne]]
  4. Hugo Ott, dans Hürten, Jäger, Ott 1980, p. 19 et 38
  5. Die geschmähte Generation, p. 271
  6. En Bade-Wurtemberg, et auparavant dans le royaume de Wurtemberg, un conseiller d’État (Staatsrat) est un type de ministre sans portefeuille, qui siège et vote lors des réunions du cabinet.
  7. (de) « Ministerpräsident, Marinerichter, Mitläufer », Der Spiegel, 2 avril 2007 [lire en ligne]
  8. (de) « Trauerfeier für Filbinger am 11. April », Focus, 5 avril 2007 [lire en ligne]
  9. (de) « Hans Filbinger war kein Nationalsozialist: Die umstrittene Passage aus Oettingers Trauerrede im Wortlaut », Südwestrundfunk [lire en ligne], consulté le 13 avril 2007
  10. (de) « Empörung über Filbinger-Rede », Kölner Rundschau [lire en ligne] ; (de) « Kritik an Filbinger-Rede », Frankfurter Allgemeine Zeitung [lire en ligne]

Liens externes

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