La ligne de Béziers à Neussargues, aussi appelée ligne des Causses, est une ligne de chemin de fer française qui relie Béziers près de la côte languedocienne à Neussargues dans le département du Cantal, viaMillau et les étendues caussenardes.
Elle est célèbre pour ses caractéristiques qui sortent de l’ordinaire : malgré un tracé tourmenté et des tunnels finalement relativement peu fréquents (comparé, par exemple, à la ligne des Cévennes), les rampes maximales atteignent 35 ‰ – ce qui n’a pas manqué de lui valoir une réputation de ligne difficile chez les cheminots. Les ouvrages d’art associés à cette ligne sont exceptionnels, tant en quantité qu’en qualité ; parmi ceux-ci, le viaduc de Garabit (près de Saint-Flour), œuvre d’Eiffel, est le plus célèbre. D’autres viaducs (en maçonnerie ou métalliques), ainsi que les installations électriques et bâtiments d'époque, typiques de la Compagnie du Midi, sont autant de points d’intérêt qui attirent les curieux.
Histoire
De Graissessac à Béziers
Origine
L’histoire de cette ligne commence avec la demande d’un chemin de fer de Graissessac (Hérault) à Béziers pour permettre l’écoulement de produits miniers. L’autorisation de la concession et l’approbation de la convention concernant ce chemin de fer interviennent le [1]. La Compagnie du chemin de fer de Graissessac à Béziers, créée pour reprendre et gérer la concession, est approuvée le [1].
Construction et ouvertures
La compagnie entreprend la construction de la ligne à voie unique et écartement standard. La voie atteint Bédarieux en 1855 et les travaux du grand viaduc de Bédarieux sur l’Orb, commencés en 1853, sont achevés en 1857[2]. La compagnie est en difficulté financière, avant l’achèvement du tracé, elle est mise sous séquestre le [1], néanmoins l’approbation de crédits pour permettre l’achèvement de la construction de la ligne et son exploitation intervient le [1]. Une première circulation officielle d’un train qui transporte le préfet, l’ingénieur en chef du département et l’administrateur du séquestre, a lieu le [3]. La section de la gare de Béziers à celle de Bédarieux est ouverte au service des marchandises le [4] et la deuxième section de Bédarieux à Graissessac est mise en service le [5]. L’ouverture du trafic voyageurs a lieu le [6].
Rapport avec la ligne actuelle
Le tronçon de Béziers à la première gare de Bédarieux était alors compris dans la première section de la ligne de Béziers à Graissessac. mise en service le [7]. Le tronçon de Bédarieux à La Tour-sur-Orb est alors compris dans la deuxième section mise en service le [8].
Rachat de la ligne
La convention signée entre le ministre des Travaux publics et la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne (Compagnie du Midi) le acte le rachat du chemin de fer de Graissessac à Béziers, dont le prix sera fixé par un arbitrage. Cette convention prévoit en outre la concession à la compagnie de deux lignes. La première de Montpellier à « Milhau »[notes 1] se raccordant à la ligne de Graissessac à Beziers au niveau de Faugeres et s'en séparant à La-Tour-d'Orb, et la seconde « de Milhau à Rodez ». Cette convention est approuvée par décret impérial le [9]. La sentence arbitrale est rendue le . Elle fixe le montant du rachat de la ligne à 16 millions de francs. Un décret impérial entérine la sentence le [10].
La ligne de la compagnie du Midi
Lorsque la Compagnie du Midi, au milieu du XIXe siècle, envisage de construire une ligne au tracé aussi ambitieux, c’est moins pour permettre aux habitants du Massif central de voir du pays que pour désenclaver les bassins miniers du nord de l’Hérault (à Graissessac) et entrer dans la concurrence pour l’acheminement des vins du Languedoc vers Paris.
En 1863, un accord commercial entre les compagnies ferroviaires avait en effet convenu que le réseau qui possèderait le trajet le plus court remporterait la totalité du marché, même si en réalité presque la totalité des trains qu’ils affrèteront continueront de contourner le Massif Central plutôt que d’emprunter ces lignes de montagne au profil peu favorable. L’ouverture de la section de Béziers à Neussargues permettait donc à la compagnie du Midi de ravir le monopole du transport de vin au PLM, en proposant un trajet de 799 km contre 804 km par la ligne de Nîmes à Clermont. Elle le conservera jusqu’en 1908 quand sera créée une ligne de 784 km par Saint-Flour et Brioude[11].
La section de Séverac-le-Château à Marvejols, s'embranchant sur la ligne de Millau à Rodez à Sévérac-le-Château, est concédée à titre définitif, et celle de Marvejols à Neussargues à titre éventuel, à la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne par une convention signée entre le ministre de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics et la compagnie le . La convention est approuvée par un décret impérial à la même date[12]. La section de Marvejols à Neussargues est déclarée d'utilité publique et concédée à titre définitif par une loi le [13].
La compagnie met en service sa ligne par section au fur et à mesure de l'avancement des travaux :
, de Banassac-La Canourgue à Marvejols[17] lorsque la compagnie ouvre la section de Banassac au Monastier et à Mende, avec embranchement du Monastier à Marvejols[18] ;
En 1884, le tracé entre Faugères et le viaduc de l'Orb est modifié sur environ 9 km par une reconstruction de la ligne plus à l’ouest, qui inclut une nouvelle gare de Bédarieux, afin de permettre la jonction avec la ligne de Castres à Bédarieux ;
Dès l'origine, la compagnie du chemin de fer du midi utilisa sur cet axe ses machines les plus puissantes en raison de son profil capricieux. À ses débuts, le trafic fret est important se composant principalement des trains desservant de bassin houiller de Graissessac et de ceux qui alimentent les villages. Afin d'améliorer les performances de la ligne et de prendre des parts de marché à la ligne des Cévennes appartenant au PLM, la compagnie du midi électrifia la ligne en 1500V par étapes à partir de 1930 avec la section Béziers-Séverac-le-Château. Dès que la ligne fut entièrement électrifiée, les premières BB midi eurent le quasi-monopole de la traction sur les Causses. La SNCF reprit la ligne en 1938 et il fallut attendre les années 50 pour que les premiers automoteurs électriques (Z 7100) assurant le service omnibus pour que les BB midi perdent leur monopole. Les premières BB 9400 firent leur apparition sur les causses dès les années 70 et il fallut attendre les années 80 pour voir se concrétiser la circulation de Z2 sur la ligne. le train à vocation touristique "Aubrac" fut mis en service en 1984. À partir des années 2000, une BB8500 assura l'Aubrac en remplacement des BB9400. Partant du constat que la voie est dans un état alarmant, un plan de modernisation fut élaboré à partir de l'an 2000. Il prévoyait à l'origine le remplacement des anciens rails par des longs rails soudés, le remplacement des traverses et le remplacement de la caténaire avec réélectrification en 25000V. Ce plan ne fut réalisé qu'en partie et seuls quelques tronçons de voie furent refaits.[réf. nécessaire]
Le tracé initial au niveau de Bédarieux, entre les postes de Pétafy et de l'Orb (PK 467,800 à 473,890), est déclassé par décret le [22].
Époque contemporaine
Malgré quelques opérations de rénovation au début des années 2000 (30 km rénovés en 2000-2001, tunnel de l’Herbouze et tronçon à Banassac rénovés), l’état de la ligne était assez critique sur certains tronçons. Un train Aubrac avait d’ailleurs déraillé en 2006. Cet état des infrastructures avait nécessité l’instauration de limitations de vitesse sur plusieurs tronçons.
Le , après un rapport mentionnant le mauvais état de la voie et les risques importants représentés sur le tronçon entre Neussargues et Loubaresse (sur lequel avait déraillé l’Aubrac en février 2006), il a alors été décidé de fermer cette section à tout trafic. Les travaux de rénovation ont été engagés par RFF pour un coût total de 7,5 millions d’euros. Les travaux achevés, la ligne a été rouverte le . Les trains peuvent désormais circuler à 75 km/h au lieu des 40 km/h depuis le déraillement.
L’Aubrac de Paris à Béziers a circulé la dernière fois le . Depuis cette date, il est limité au parcours de Clermont-Ferrand à Béziers. Il garde cependant son statut de train Intercités et est en correspondance avec un autre Intercités entre Paris et Clermont-Ferrand.
Le , à la suite de la découverte d’une fissure sur l'une des maçonneries des piles du viaduc de Garabit lors d’une visite, la ligne fut à nouveau interrompue, entre Neussargues et Saint-Chély-d’Apcher, pour raisons de sécurité[23]. Depuis, le trafic a repris.
Depuis le , la rame tractée est remplacée par un autorail de type X 73500. Le train conserve néanmoins son statut Intercité.
La ligne est une nouvelle fois interrompue entre Neussargues et Saint-Chély-d'Apcher à compter du à la suite d'un incident affectant les voies, pour une durée indéterminée[24]. Les circulations ont pu reprendre le 15 novembre 2021[25].
Caractéristiques
C’est aujourd’hui une ligne à voie unique banalisée sur la totalité du parcours. Elle était à double voie autrefois sur les tronçons de Millau à Saint-Laurent-d'Olt, et du Monastier à Saint-Sauveur-de-Peyre. Le profil, en dents de scie, est difficile. Des rampes de grande longueur qui atteignent 33,5 ‰ sont présentes sur une grande partie du parcours. Il existe près de 700 courbes dont plus de la moitié ont un rayon de 300 m[26].
Il existe 38 tunnels dont le plus long, celui de Pétafy, à une longueur de 1 850 m. La longueur cumulée des tunnels est de 17,5 km.
La ligne a été électrifiée en trois étapes en 1,5 kV continu :
de Béziers à Bédarieux le ;
de Bédarieux à Sévérac-le-Château le ;
de Sévérac-le-Château à Neussargues le .
Vitesses limites
Vitesses limites de la ligne en 2012 pour les rames AGC, en sens impair (nord - sud). Certaines catégories de trains, comme les trains de marchandises, possèdent généralement des limites plus faibles[27] :
Aujourd’hui, l’acier a remplacé le charbon et l’alcool : l’approvisionnement en coils (bobines de tôle) de l’usine ArcelorMittal de Saint-Chély-d'Apcher, qui assure une part importante des emplois de l’industrie lozérienne, est assuré par le rail. 120 000 tonnes d’acier sont ainsi acheminées tous les ans depuis Fos-sur-Mer ou Dunkerquevia la ligne des Causses.
Si le trafic voyageurs participe également au maintien de l’exploitation de la ligne, cette dernière subit néanmoins la rude concurrence de l’autoroute A75 qui suit le même tracé, mais qui est gratuite (à l’exception du tronçon comprenant le viaduc de Millau), et offre une pléthore de bretelles d’accès. La région Auvergne-Rhône-Alpes ne propose aucun TER sur sa section, et la région Occitanie ne propose plus qu'un seul aller-retour journalier en TER entre Béziers et Saint-Chély, avec quelques circulations supplémentaires au départ de Bédarieux et Millau vers le sud. Les trains omnibus tendent à disparaître au profit des autocars sur certaines parties de ligne. En outre, la circulation du train de nuit direct (avec couchettes) entre Paris, Clermont-Ferrand, Millau et Béziers a été suspendue à la fin de l’été 2003. Tandis que le train surnommé Aubrac, train emblématique de la ligne puisque assurant une relation directe et diurne de Paris à Béziers via Clermont-Ferrand et les Causses depuis les années 1980, a vu son parcours limité depuis 2007 au segment de Clermont à Béziers. Une correspondance entre Intercités étant assurée, à Clermont-Ferrand, de et vers Paris.
Le projet de prolongement d’un TGV de Paris à Béziers vers Millau et conventionné par la Région n’a pas, pour le moment, connu d’évolution. Seule la partie entre Saint-Chély-d'Apcher et Béziers a pu être modernisée. Il reste à moderniser la portion auvergnate (remplacement des rails Midi par des longs rails soudés). Toutes les sous-stations Midi ont été électronisées (redresseurs secs de puissance). Entre Neussargues et Saint-Chély-d'Apcher, les rails ont été détériorés du fait de l’utilisation des CC 72000 ou des CC 72100 (tonnage élevé), pour les trains de coils. Certains tronçons de la ligne ont été conçus pour deux voies. La compagnie du Midi avait également prévu cette possibilité lors de l’électrification (exemple : Viaduc d’Aguessac avec caténaires ogives Midi identiques à celles posées en 1927, lors de l’électrification de la ligne de Bordeaux à Irun).
Pour des raisons de logistique et de roulement, certains TER Languedoc Roussillon sont assurés en BGC 81500 bi-mode pour la desserte de Mende et de Rodez. L’automoteur circule en mode diesel sur ces lignes et circule en mode électrique 1 500 volts continu sur la ligne des Causses (changement de mode à Sévérac-le-Château et au Monastier).
Entre Neussargues et Saint-Chély-d’Apcher, l'Aubrac est le dernier train de voyageurs à circuler. Le train de marchandises livrant des coils à Saint-Chély-d’Apcher depuis Neussargues est tracté grâce à deux locomotives de type BB 67400 (même si celles-ci sont anciennes) en remplacement des locomotives du type BB 75000 qui avaient pris le relais avant leur interdiction sur la ligne depuis 2014 du fait de leur trop grand impact sur la voie. Depuis 2023/2024, ce sont des BB 60 000, ou 61 000, qui ont, définitivement, remplacé les BB 67 400, sur ce train de coils
La fermeture de la ligne était évoquée pour courant 2016, faute d'entretien suffisant, sur l'ensemble de la section Neussargues-Béziers[28].
Il existe cependant un doute quant à cette perspective, notamment du fait de l'arrivée d'environ 1300 militaires de la Légion étrangère sur le plateau du Larzac d'ici 2018[29] et des besoins d'acheminement en hommes et matériels en découlant[30].
Projet
Il existe[Quand ?] un projet de création d'une halte à Aguessac dans le cadre de la réouverture de la ligne de Rodez à Séverac et ainsi de la reprise des circulations entre Millau et Rodez[31].
Galerie de photographies
La tête sud du tunnel du col de Mallet. (PK 703,500)
La gare de Talizat traversée par une Z 7500 (PK 702,971)
↑Orthographe du nom de la commune de Millau à l'époque.
Références
↑ abc et dMinistère des Travaux Publics, Direction de l’exploitation, du contrôle financier et de la statistique des chemins de fer, Division du contrôle des comptes de compagnies et de la statistique. Supplément, Répertoire méthodique de la législation des chemins de fer français, imprimerie nationale, 1864, p. 131 intégral (consulté le 25 septembre 2011).
↑François et Maguy Palau, « 3.26 Béziers-Bédarieux 20 septembre 1858 (première section de la ligne Béziers-Graissessac) », dans Le rail en France : Le Second Empire, t. 2 (1858-1863), Palau, (ISBN2-950-942-12-1), p. 49-51.
↑François et Maguy Palau, « 3.32 Bédarieux-Graissessac 28 décembre 1858 (deuxième section de la ligne Béziers-Graissessac) », dans Le rail en France : Le Second Empire, t. 2 (1858-1863), Palau, (ISBN2-950-942-12-1), p. 60-61.
↑« N° 11553 - Décret impérial qui approuve la convention passée, le 1er mai 1863, entre le ministre de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics et Compagnie du chemin de fer du Midi et du canal latéral à la Garonne : 11 juin 1863 », Bulletin des lois de l'Empire Français, Paris, Imprimerie Impériale, xI, vol. 22, no 1141, , p. 153 - 158 (lire en ligne).
↑« N° 13928 - Décret impérial qui incorpore définitivement au nouveau réseau de la Compagnie du chemin de fer du Midi et du canal latéral à la Garonne, les chemins de fer de Graissessac à Béziers et de Carmaux à Albi : 23 décembre 1865 », Bulletin des lois de l'Empire Français, Paris, Imprimerie Impériale, xI, vol. 27, no 1361, , p. 1 - 3.
↑Pierre Charbonnier, Histoire de l’Auvergne des origines à nos jours : Haute et Basse-Auvergne, Bourbonnais et Velay, Clermont-Ferrand, De Borée, , 540 p. (ISBN2-908592-98-3 et 978-2-908592-98-6), p. 490
↑« N° 16363 - Décret impérial qui approuve la convention, passée le 10 août 1868, entre le ministre de l'Agriculture, du Commerce et des Travaux publics et la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne : 10 août 1868 », Bulletin des lois de l'Empire Français, Paris, Imprimerie Impériale, xI, vol. 32, no 1642, , p. 640 - 648.
↑« No 3112 - Loi relative à la déclaration d'utilité publique et à la concession définitive de plusieurs chemins de fer concédés à titre éventuel, et à l'adjudication de plusieurs chemins classés et non concédés : 23 mars 1874 », Bulletin des lois de la République Française, Paris, Imprimerie Nationale, xII, vol. 8, no 205, , p. 801 - 823 (lire en ligne).
↑« Recettes de l'exploitation des chemins de fer français - premier semestre des années 1873-1872 : Observations », Journal des Chemins de Fer, vol. 1873, no 1679, , p. 456 (lire en ligne, consulté le )
↑France : Direction des chemins de fer, « Compagnie du Midi : relevé des ouvertures par réseau », dans Chemins de fer français : Situation au 31 décembre 1862-1886, Imprimerie nationale, (lire en ligne), p. 177
↑André Colomb, Laissac, Subervie, (lire en ligne), p. 63
↑ ab et cGautié (Ingénieur en chef), « Chemins de fer du Midi : Rapport de l'ingénieur en chef du contrôle des travaux et de l'entretien », dans Rapports et délibérations / Département de la Lozère, Conseil général, Mende, (lire en ligne), p. 1
↑« Statistique : Ouvertures, concessions et déclarations d'utilité publique des chemins de fer d'intérêt général et d'intérêt local en France, en Algérie, et au Sénégal, pendant l'année 1884 », Revue générale des chemins de fer, Dunod, , p. 107 (lire en ligne)
↑« Statistique : Ouvertures, concessions et déclarations d'utilité publique des chemins de fer d'intérêt général et d'intérêt local en France et en Algérie pendant l'année 1888 », Revue générale des chemins de fer, Dunod, , p. 182 (lire en ligne)