Anne-Françoise-Hippolyte Boutet, dite Mademoiselle Mars, est une comédiennefrançaise, née le à Paris où elle est morte le [1].
Les débuts
Mademoiselle Mars est la fille naturelle des comédiens Monvel et Jeanne-Marguerite Salvetat, dite Madame Mars, restée trois ans à la Comédie-Française après y avoir été reçue en 1778. Elle a pris ce nom car elle ne pouvait prendre celui de son père, qui avait manqué à ses promesses en n'épousant jamais Jeanne-Marguerite[2], et dont elle eut une demi-sœur prénommée Joséphine[3].
Elle reçut son éducation théâtrale du futur second époux de sa mère, un vieux comédien du Théâtre Montansier, Jean-Baptiste Lesquoy dit Valville[4], régisseur du Théâtre Louvois. Il la fit commencer très jeune dans des rôles d'enfant[5].
Mademoiselle Mars entre à la Comédie-Française par l'entremise de l'actrice Louise Contat en 1795[6]. Elle y joue des rôles d'ingénues et d'amoureuses du théâtre français, principalement dans Molière, et elle est admise comme sociétaire en 1799.
En 1812, après le départ de Mlle Contat, elle trouve d'autres emplois, notamment celui de coquette (Célimène dans Le Misanthrope) ou de marquise dans les pièces de Marivaux.
Paris admire son talent, son charme et son jeu d'actrice. Napoléon lui accorde une entrevue dans un kiosque du jardin de Rambouillet, à la suite de quoi il la protégera et lui offrit un mobilier de chambre à coucher qui fut exposé en 1933 dans un décor d'A.Lion ; il illustra l'article Regards sur le passé de Jacques Boulenger (numéro de "L'Illustration" consacré aux intérieurs modernes du 27/05/1933 - arch. pers.).
Ces deux personnalités s'apprécièrent sincèrement. Pendant les Cent-Jours, elle porta sur scène des violettes, fleurs qui servaient de signe de ralliement aux partisans de l'Empereur [7].
Après l'Empire
À la Restauration, Mlle Mars est victime d'une campagne menée à son encontre par les royalistes, qui ne lui pardonnent pas sa carrière sous l'Empire. Louis XVIII lui attribue en revanche une pension de 30 000 livres en récompense de son talent.
Mlle Mars prend le risque de jouer dans les premiers drames modernes et romantiques et réussit à s'adapter à ces rôles parfois difficiles.
Elle joue en bourse, perdant des sommes énormes, et prêtant beaucoup, mais sa fortune lui permettant de telles extravagances, elle efface les dettes de ses débiteurs avant de mourir en 1847.
Elle est inhumée à Paris au cimetière du Père-Lachaise (8e division)[9],[10]. Victor Hugo assiste à ses funérailles et raconte la foule immense piétinant les tombes voisines, les actrices du Théâtre-Français jetant sur le cercueil des bouquets de violettes, les prêtres se retirant pour ne pas assister aux éloges funèbres d'une comédienne[11].
↑Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne, volume 27 : N'étant point mariée, elle aurait pu l'être effectivement, et n'en perdit totalement l'espoir qu'au moment où Monvel, appelé en Suède par le souverain du pays, prit pour femme la fille d'un ancien comédien, pensionnaire du roi, nommé Cléricourt.
↑Eduard Maria Oettinger, Mademoiselle Mars et sa cour : Lorsque le parjure Monvel, après un éloignement de six années, était revenu en 1788 de la capitale de la Suède à Paris, il y avait ramené avec lui une nouvelle femme, Mlle de Cléricourt, fille d'un vieux comédien pensionné, ainsi qu'une enfant issue de cette union et nommée Joséphine. Ivre de fureur, madame Mars avait alors fait le serment de ne jamais revoir le père de sa fille, ce qui sembla ne toucher que fort peu M. Monvel.
↑Paul Bauer, Deux siècles d'histoire au Père-Lachaise, 2006
↑Jean-Germain-Désiré Armengaud, Les reines du monde, par nos premiers écrivains : Madame Mars continua à courir la province avec la troupe qu'avait organisée mademoiselle Montansier, à demi distraite de son malheur par l'éducation qu'elle donnait à sa fille, à demi consolée par l'amitié de l'acteur Valville, qui fut le premier maître de mademoiselle Mars.
↑Auguste Jal, Dictionnaire critique de biographie et d'histoire : « Du mercredy dixième (février 1779) fut baptisee Anne-Françoise-Hippolite [sic], fille de Jacques-Marie Boutet, bourgeois de Paris, et de Jeanne-Marguerite Salvetat, son épouse, rue St-Nicaise ; le parrain Jean-François Aladune, caissier des fermes, la marraine Anne Bosse veuve de Joseph Fabre, bourgeois de Marseille ; l'enfant est ne d'hier et ont signé Aladane, Bosse, Boutet, Le Bas, vicaire. » (Registre de Saint-Germain-l'Auxerrois.) Le Jacques-Marie Boutet, père d'Anne-Françoise Hippolyte, n'était point celui quem nuptiae demonstrant, et l'acte donné à Jeanne-Marguerite Salvetat la qualité d'épouse qu'elle n'avait pas et qu'elle ne put jamais avoir, Boutet, c'est-à-dire Monvel, l'acteur célèbre, ayant oublié ses promesses et pris femme en Suède. À la marge du registre de Saint-Germain-l'Auxerrois, on lit l'extrait d'un jugement du 1er décembre 1847, ordonnant que l'acte de baptême d'Anne-Françoise Hippolyte Boutet, dite depuis Mademoiselle Mars, serait rectifié en ce qu'il y a été dit que Jeanne-Marguerite Salvetat était l'épouse de Jacques-Marie Boulet, dont le mariage alors projeté ne s'est jamais réalisé.
↑Note de Hubert Juin, Choses vues 1847-1848, Gallimard, p. 472.