À Londres au XIXe siècle, Edmund Kean est un comédien shakespearien adulé. Don Juan invétéré, il amuse par sa faconde et son esprit la bonne société londonienne. Eléna, la charmante épouse de l’ambassadeur du Danemark? est éprise de l’acteur. Le prince de Galles apprend que cet émoi est réciproque, et lui propose de renoncer à cette idylle contre une forte somme d'argent.
Sartre s'intéresse ici principalement à la perception de l'acteur — qui ne parvient pas à être naturel, ne peut s’empêcher de jouer un rôle — et au théâtre de la société, représenté ici par les conventions bourgeoises du XIXe siècle. Le philosophe condamne l'hypocrisie et le rôle que nous jouons en permanence dans notre société.
Citation
Kean : « Voilà donc le soleil. Il faudra que je m'y habitue. Celui de Kean était peint sur une toile. Salomon, le ciel de Londres était une toile peinte : tous les matins, tu levais les rideaux, je levais la tête et je voyais... Ah ! Je ne sais plus ce que je voyais ! Quand l'homme est faux, tout est faux autour de lui. Sous un faux soleil, le faux Kean criait les fausses souffrances de son faux cœur. Aujourd'hui, cet astre est véritable. Comme elle est morne la vraie lumière. Dis, Salomon, la vérité, ça ! C'est vrai, c'est vrai que je suis un homme fini. Je n'arrive pas à y croire. Il y a des moments où j'ai le sentiment que je vais tout comprendre et puis ça s'évanouit. (Un temps) Prête-moi cent florins, donne la moitié aux domestiques et renvoie-les sur-le-champ. Garde l'autre pour toi. J'attendrai la police dans ce fauteuil. » (V, 2)