Le , la constitution civile du clergé fut adoptée, instaurant l'élection des curés et des évêques et leurs appointements par l'État. Sur 130 évêques, 126 la refusèrent, ainsi qu'environ la moitié des prêtres (en proportion variable selon les provinces).
La rupture entre les réfractaires et la Révolution fut consommée le à la suite du bref du pape déclarant la constitution civile du clergé « hérétique et schismatique ». Le , un décret de l'assemblée législative ordonna la déportation des prêtres réfractaires[1].
Dans ce contexte, la communauté des religieux des carmes déchaussés dut quitter son monastère qui fut auparavant pillé, notamment la bibliothèque. Le bâtiment fut immédiatement transformé en prison pour accueillir les « suspects », qui devinrent, pour une large part, les victimes des massacres de septembre 1792.
191 ecclésiastiques dont trois évêques y furent exécutés dans des conditions particulièrement violentes, sous la conduite du commissaire Stanislas-Marie Maillard, exécuteur des ordres du Comité de surveillance[2].
Du tribunal installé dans le couvent, il jugeait et condamnait un à un tous ceux qui se présentaient devant lui « à la force ». La porte s'ouvrait et dès que les religieux qui avaient refusé de prêter serment à la constitution civile du clergé en franchissaient le seuil, ils tombaient sous les piques ou les baïonnettes[3]. Ce massacre dura toute la nuit[1].
Ce dernier, député du clergé aux états généraux, qui vota l'abolition des privilèges, refusa la constitution civile du clergé, par fidélité à Rome. Dénoncé, puis arrêté, il fut enfermé dans la prison des Carmes, où il périt parmi ses compagnons.
Jean-François Bousquet est le fils d'une famille aisée du village de Ginestas, né le . Il poursuit des études à Toulouse et il devient docteur en théologie. Il est ordonné prêtre à Narbonne en 1777 et rejoint le diocèse de Paris. Auteur de recherches sur les sentences canoniques et de deux volumes de droit canonique, il est dénoncé, arrêté et enfermé dans le couvent des Carmes en [5].
René Nativelle, vicaire du curé d'Argenteuil et Jean-Baptiste Nativelle, vicaire du curé de Longjumeau, son frère furent également exécutés[6].
Postérité
Ceux qui sont morts ce jour-là ont été appelés les « martyrs de Septembre » ou encore les « martyrs des Carmes ». Une plaque de marbre sur laquelle figurent les mots « Hic ceciderunt » (« Ici, ils périrent) » indique le lieu de leur martyre. Le , le pape Pie XI béatifie les 191 « martyrs des Carmes »[1]. Ils sont commémorés par l'Église catholique le dans le calendrier liturgique[7].
Joséphine de Beauharnais et Thérésa Tallien y furent emprisonnées pendant la Révolution. Joséphine de Beauharnais écrivit de sa main un message qui fut contresigné par Thérèse Tallien sur un mur : « Liberté, quand cesseras-tu d’être un vain mot ? Voilà dix-sept jours que nous sommes enfermées. On nous dit que nous sortirons demain, mais n'est-ce pas là un vain espoir ? ». Ce message est conservé dans une vitrine.
En 1992, à Ginestas (Aude), une croix en granite de 12 mètres de haut est érigée en mémoire de l'enfant du pays, Jean-François Bousquet, mort dans la prison des Carmes le , et déclaré bienheureux, avec les autres « martyrs », en 1926[5].
Notes et références
↑ abc et dClémence Houdaille, « Les martyrs de la Révolution », La Croix, no 40621, , p. 16-17.
↑Église Saint-Joseph-des-Carmes. À l'abbaye, sous la « présidence » de Maillard, ils dureront jusqu'au 4 septembre en fin de matinée (180 morts environ, dont 21 prêtres sur 238 prisonniers, dont 29 prêtres), aux Carmes, avec Violette, ils cesseront vers 18 heures faisant 116 morts sur 162 à 172 prisonniers.
↑Bienheureux Martyrs des Carmes Le , elles sont investies par des sans-culottes motivés. Les assassinats qui inaugurent le carnage sont suivis d'un simulacre de jugement : « J'appartiens à l'Église catholique, apostolique et romaine. » À ce titre, exécution est immédiate. Plus d'un millier d'entre ces prisonniers sont tombés en ces jours sous une fureur populaire incontrôlée.
↑Le Frère Salomon a été canonisé le par le pape François. Il est le premier saint canonisé de la Révolution française.
Gérard Cholvy éd., Un évêque dans la tourmente révolutionnaire, Jean Marie du Lau, archevêque d’Arles, et ses compagnons martyrs, 1792-1992, colloque du IIe centenaire tenu à Arles les 2-, Montpellier, Université Paul Valéry, 1995.
Mère Saint-Jérôme, La Vie de la Révérende Mère Thérèse Camille de Soyécourt, carmélite, Paris, Vve Poussielgue-Rusand, , 309 p. (lire en ligne), p. 167-172, note de bas de page.
Paris (France), Mairie annexe du VIe Arrondissement, Association du souvenir des martyrs et Amis du VIe (Paris, France), 1792, les massacres de septembre : les Carmes, l'Abbaye, Saint-Firmin : Mairie du VIe arrondissement, 11 septembre-4 octobre 1992, La Mairie, , 181 p. (lire en ligne).
R. P. Dom H. Leclercq, Les Martyrs - La Révolution (1791-1794) : Recueil de pièces authentiques sur les martyrs depuis les origines du christianisme jusqu'au XXe, t. XI, Paris — Poitiers, , 520 p. (lire en ligne), p. 109-112 — L'abbé de Lapize La Pannonie, rescapé des massacres de septembre 1792 à la prison des Carmes, vécut la Terreur à Paris. Son le témoignage alimenta les récits de la Contre-Révolution.
Filmographie
Napoléon, 1927, film d'Abel Gance. Une séquence mentionne la prison des Carmes.