Sa longueur a beaucoup varié au gré des années et des remaniements de son tracé, notamment à partir de 1937, où la route 66 a cessé de desservir la ville de Santa Fe, au Nouveau-Mexique. La longueur communément admise est celle postérieure à ce remaniement, soit environ 2 280 mi (3 670 km)[1]. Avant 1937 elle était de 2 448 mi (3 939 km)[2]. La route 66 traverse trois fuseaux horaires et huit États (d'est en ouest : Illinois, Missouri, Kansas, Oklahoma, Texas, Nouveau-Mexique, Arizona et Californie). Son point central se trouve dans la petite ville d'Adrian, au Texas. Elle fut la première route trans-continentale goudronnée en Amérique. Les Américains la surnomment The Mother Road ou Main Street USA.
Pendant la Grande Dépression des années 1930 et la vague de sécheresse du Dust Bowl, c'est par la route 66 que les fermiers à la recherche d'un emploi migrèrent vers la Californie.
La route 66 a été officiellement déclassée en . Si elle n'a plus d'existence officielle, elle conserve un caractère mythique et est sans doute la plus connue des routes américaines. Depuis le début des années 1990, des mouvements se sont créés pour assurer sa préservation, et les initiatives visant à y développer le tourisme sont de plus en plus nombreuses. La route est ainsi à nouveau fléchée à plusieurs endroits sous le nom Historic Route 66.
Elle a inspiré plusieurs chansons, dont (Get your kicks on) Route 66, reprise notamment par Chuck Berry, et apparaît dans de nombreux films. Elle fait partie de l'imaginaire du road trip dans la culture populaire américaine.
Histoire
La route 66 est l'héritière du chemin emprunté par l'expédition d'Edward Fitzgerald Beale vers l'ouest en 1857, qui cherche à tracer une voie d'accès vers la Californie. Le , le président Woodrow Wilson crée le réseau routier moderne. Les routes est-ouest portent un numéro pair tandis que les voies nord-sud sont dotées d'un numéro impair[3].
L'itinéraire a été commissionné le [4], en fédérant des portions de routes existantes. À l'époque, la route n'est pavée que sur un tiers de sa longueur[4],[1]. Elle est initialement nommée route 60[1],[5],[3]. Cyrus Avery, président de l'Associated Highways Associations of America, est considéré comme son « père fondateur »[5],[6]. Une course à pied, la course transaméricaine, est organisée en 1928 et 1929 entre Los Angeles et New York en passant par Chicago, pour la faire connaître. Il faut attendre douze ans avant que toute sa longueur ne soit pavée de dalles de ciment Portland rose[7]. Ce n'est qu'en 1938, notamment grâce à la politique du New Deal lancée par le président Franklin Delano Roosevelt, que la route est revêtue de Chicago à Santa Monica[5].
Pendant son heure de gloire, la route 66 recevra de nombreux surnoms. La National US 66 Highway Association, qui se charge de populariser la route auprès du grand public, la nommera Main Street of America, une appellation justifiée par le fait que la route 66 faisait office de rue principale dans la plupart des villes qu'elle traversait. Dans son célèbre roman Les Raisins de la colère, John Steinbeck la baptisera The Mother Road (la « route-mère »), car toutes les routes secondaires débouchaient sur la route 66. À l'époque, après la crise de 1929, de nombreuses familles émigrent par cette route dans le contexte de la Grande Dépression et du Dust Bowl[3]. Plus tard, elle recevra le nom de Will Rogers Highway, en mémoire de l'acteur.
Durant l'après-guerre, la route 66 constitue un itinéraire majeur autour duquel se développent de nombreuses villes comme Amarillo (au Texas), Albuquerque (au Nouveau-Mexique), Flagstaff et Kingman (en Arizona). Des centaines de motels, de cafés, de stations-services, d'attractions touristiques et autres boutiques de souvenirs (curio shops) s'établissent le long de la route[5].
Avec l'augmentation du trafic, elle est surnommée « Bloody 66 »[3].
Très impressionné par le réseau autoroutier allemand, le président Eisenhower lance en 1954 le President’s Advisory Committee on a National Highway Program, dont l'objectif est de réfléchir à la mise en place d'un réseau autoroutier moderne sur tout le territoire américain. Deux ans plus tard, les budgets sont votés et les premières autoroutes (Interstates) mises en chantier. Avec le développement des autoroutes, la route 66 perd de son utilité. La nouvelle Interstate 40 la remplace en partie[3]. Là où elle subsiste (certains tronçons sont repris pour construire les autoroutes), son usage redevient majoritairement local. En 1984, le dernier segment de la 66 est « court-circuité » à Williams[8] en Arizona.
La route 66 est officiellement déclassée le [9]. Pour les commerces et villages qui vivaient de la route 66, le contournement par les Interstates a souvent été vécu comme une tragédie[10]. Des petits commerces ont été abandonnés, parfois même des villages entiers. Mais depuis plusieurs années, l'animation revient : les motels, boutiques et lieux historiques bordant la route 66 sont petit à petit restaurés, accueillant à nouveau les voyageurs. Par ailleurs, des associations locales et des passionnés de l'histoire de la route tentent d'entretenir sa mémoire et de conserver des objets témoins de son passé mythique[3].
Route 66 est également une chanson célèbre, écrite en 1946 par Bobby Troup lors d'un road-trip avec sa femme sur la US40 puis sur la route 66, dont il énumère les villes traversées[3]. C'est Nat King Cole qui fera de cette chanson mythique, un hit aux États-Unis, la même année. La chanson a été reprise par de nombreux artistes : Chuck Berry, les Rolling Stones, Brian Setzer, Depeche Mode en 1987, Guitar Wolf. Eddy Mitchell a également chanté cette route dans son album Frenchy (Sur la route 66). La chanson a également été interprétée par Bobby Troup lui-même, notamment sur scène, au Japon en 1964.
Itinéraire en images
Voici une liste des principales étapes de la Route 66, d'est en ouest dans le sens de lecture, comme le voudrait la tradition : qu'on la parcourt, comme les colons, les exilés de la Grande Dépression et du Dust Bowl ou les vacanciers des années 1950 et 1960. Le point de départ actuel est marqué par un panneau situé à la hauteur du 85 Adams Street, en face de l'Art Institute of Chicago dans le secteur financier du Loop (Chicago).
Panneau marquant le début de la route 66 à Chicago (Illinois).
Route 66 est un livre collectif, édité aux éditions SPE-Barthélémy en 1992, réalisé par l'écrivain voyageur Jean-Patrick Reymond, le photographe Patrick Bard et Philippe Lacarrière. Fruit de plusieurs années de travail, cet ouvrage est à l'origine de la médiatisation de « La mère des routes » en France au début du XXIe siècle.
Elle occupe une place centrale dans le film d'animation de John Lasseter, Cars sorti en 2006[52]. Lasseter a fait appel aux meilleurs spécialistes pour se documenter en pré-production du film, et certains lieux de l'action sont directement inspirés de sites existant réellement[53], par exemple Flash McQueen se retrouve à Radiator Springs (ville fictive située quelque part sur la Route 66)[54]. Sally raconte dans le film l'histoire de la ruine financière des petites villes de la Route 66 due à la construction de l'Interstate 40.
Le film The Hitcher (1986, Robert Harmon) a été tourné en partie au Roy's Cafe, à Amboy.
Dans Bagdad Café, le motel défraîchi qui accueille l'un des personnages se trouve en bordure de la Route 66[55].
Le véritable Bagdad Café, autrefois appelé Sidewinder Cafe, existe non loin du village fantôme de Bagdad, à Newberry Springs sur l'ancienne Route 66 et reçoit chaque année la visite de nombreux fans nostalgiques (coordonnées géographiques : 34° 49′ 11,1″ N, 116° 38′ 37,5″ O).
Elle a donné son nom à une série télévisée à succès diffusée sur CBS (jamais en France), constituée de 116 épisodes et tournée entre 1960 et 1964.
Elle est un élément essentiel de la série en trois épisodes, The Lost Room, dans laquelle l'intrigue principale a un rapport direct avec un motel se trouvant certainement sur la route 66[62].
Elle est médiatisée en France, lors de deux émissions qui lui sont consacrées dans le magazine Turbo animées par Dominique Chapatte, sur M6, à la suite de la parution du livre homonyme "Route 66" des éditions SPE - Barthélémy, en .
Elle est utilisée en tant que comparaison au chemin pour s'évader, dans l'épisode 8 de la saison 1 de Prison Break.
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