Académie royale de musique (1821 à 1848), Académie nationale de musique (1848 à 1851), Académie impériale de musique (1852 à 1870), Académie nationale de musique (1871 à 1873).
Il était situé au 12 de la rue Le Peletier (Paris 9e). Il fut détruit par un incendie dans la nuit du 28 au , ce qui accéléra la reprise de la construction de l’opéra Garnier, qui lui succéda en 1875.
Appellations
Le nom officiel, gravé sur la façade, fut successivement : Académie royale de musique, de 1821 à 1848 ; Académie nationale de musique, de 1848 à 1851 ; Académie impériale de musique, de 1852 à 1870, et de nouveau Académie nationale de musique, de 1871 à 1873.
Le nom courant était Opéra Le Peletier ou Opéra de la rue Le Peletier.
Décision est prise de construire rapidement une salle « provisoire ». Ce sera l'opéra Le Peletier, conçu par l'architecte François Debret (en collaboration avec Grillon et Du Bois) et construit en un an, du au . Durant toute sa vie, c’est-à-dire de 1821 à 1873, d’autres salles donnèrent des spectacles lyriques à Paris, mais pas de grand opéra : l’Opéra-comique, le Théâtre-Lyrique, le Théâtre de la Gaîté.
La construction de l'opéra Le Peletier coïncide avec le percement d'un prolongement de la rue Chauchat jusqu'à la rue Pinon (aujourd'hui rue Rossini).
De forme rectangulaire, le nouveau bâtiment comprend (voir le plan[2]) :
à l'ouest : la façade, sur un petit côté, rue Le Peletier ; elle est ornée de huit statues (huit Muses ; celle de la musique manquait) ;
au nord : un grand côté donne sur le trottoir sud de la rue Pinon (aujourd'hui rue Rossini) ;
à l'est : le petit côté arrière, limité par un passage, sombre et humide, longeant la façade de l’hôtel Choiseul, sert d'entrée aux artistes. Ce passage, perpendiculaire à la rue Pinon, se situe approximativement à mi distance entre les deux rues actuelles Chauchat et Drouot.
Comme il s'agit d'une salle « provisoire » — mais elle sera utilisée finalement plus d'un demi-siècle ! —, on réutilise les matériaux de l'opéra de la rue de Richelieu, tels que les colonnes, le devant des loges, la coupole, les corniches, etc.[3], et la construction est légère :
« Pour les spectateurs assis au parterre, la salle Le Peletier est absolument la même que la salle Richelieu, seulement on a donné six places de plus à l'ouverture de l'avant-scène. Le théâtre est beaucoup plus profond que l'ancien, les corridors plus larges, une immense galerie servant de foyer au public ; telles sont les améliorations que l'on remarque dans la nouvelle salle ; mais gare à l'incendie ! Il serait effroyable. Cet édifice, n'ayant pas de murs pour contenir le feu, formera cheminée,... »[4]
L'éclairage se fait au gaz (hydrogène). La salle d'environ 1800 places[5] est grande, riche et bien distribuée, et dispose de vastes dégagements. Comme la construction en est extrêmement légère, elle est d'une remarquable sonorité[6].
1822. Le , le gaz est utilisé pour la première fois pour éclairer les effets de scène, dans Aladin ou la Lampe merveilleuse, opéra-féerie en cinq actes de Nicolas Isouard et de Benincori, livret de Charles-Guillaume Étienne.
1831-1835. Dans ces années où le docteur Louis Véron est directeur, le foyer est ouvert aux abonnés et de grands bals masqués sont organisés par Philippe Musard.
1858. Devant l'entrée de l'opéra où ils se rendent en calèche, le , l'empereur Napoléon III et l'impératrice Eugénie subissent l'attentat d'Orsini. Les bombes que cet indépendantiste italien et ses deux complices lancent sur le cortège font de nombreuses victimes et des dégâts importants, mais le couple impérial s'en sort indemne et peut se montrer à sa loge (voir le récit détaillé). Le spectacle continue selon le programme prévu[7], composé pour honorer le baryton Eugène Massol qui prend sa retraite : fragments du deuxième acte de Guillaume Tell de Rossini ; dernier acte de Marie Stuart, tragédie en cinq actes de Schiller[note 3] ; extraits du ballet Gustave III ou le Bal masqué d'Auber (pas « chinois », pas « nouveau », pas « du Cheval de bronze »). C'est deux jours après l'attentat que Wagner arrive à Paris ; c'est son sixième séjour en France, au cours duquel il rend visite à Hector Berlioz, qui lui lit le poème des Troyens
1862. Le , lors d'une répétition du ballet de La Muette de Portici, les vêtements de la danseuse Emma Livry prennent feu. Elle meurt après une agonie de huit mois.
Destruction
La salle est totalement détruite dans la nuit du 28 au [note 4], par un incendie qui dure près de vingt-quatre heures et dont les causes resteront inconnues.
On déplore un mort, le caporal de pompiers Bellet[9].
Sont anéantis, avec le bâtiment : la machinerie de la scène, le magasin d'accessoires, les armures, le mobilier du théâtre et de la salle, le matériel d'éclairage, les bustes du foyer, entre autres celui de Gluck, chef-d'œuvre de Houdon, la statue assise de Rossini qui se trouvait derrière le contrôle, des instruments de musique ;
Sont préservés, grâce à Charles Nuitter, l'archiviste, et à M. Cœdès, le souffleur : tous les papiers historiques de la maison, les livrets, les partitions, la collection des affiches depuis l'an XII, le recueil des états d'émargement depuis 1749 contenant les autographes des artistes.
La destruction de l'opéra Le Peletier a plusieurs conséquences notables :
la construction de l'opéra Garnier reprend activement, pour s'achever un an plus tard ; la nouvelle salle d'opéra de Paris est inaugurée le . Durant l'année d'attente (1874), les représentations ont lieu à la salle Ventadour.
on en tire l'idée d'un réseau de bouches à incendie réparties sur les boulevards et artères de la ville[10].
la place libérée permet un réaménagement du quartier, qui dure jusqu'en 1927 et qui comprend :
Bal masqué à l'opéra, 1873, National Gallery of Art (Washington). Le peintre s'est représenté sur le tableau : c'est le deuxième personnage en partant de la droite, avec une barbe blonde ; il semble avoir laissé tomber sa carte au sol.
Notes et références
Notes
↑Fin de l’ouverture écourtée et prolongée par le ballet La Bacchanale du Venusberg.
↑Le Monde illustré, n° 224, 27 juillet 1861, p. 478.
↑Albert de Lasalle écrit, p. 276-277 :« C'est vers huit heures du matin que le caporal des pompiers Bellet, qui était monté sur un mur miné par le feu, perdit l'équilibre et tomba dans la fournaise. On entendit un grand cri, et puis plus rien !... Les restes informes de la malheureuse victime furent retrouvés quelques jours après et inhumés au cimetière Montparnasse. L'office des morts fut chanté, à l'église du Val-de-Grâce, par tout le personnel de l'Opéra, accompagné par l'orchestre. Il n'y eut point d'autre mort à déplorer ; mais l'ambulance établie à la mairie Drouot soigna quelques blessures légères. M. Diaz, l'auteur de la Coupe du roi de Thulé, avait reçu une contusion à la cuisse ; on cite encore un commis de banque frappé à la main par une ardoise, et un officier prussien (il y en a partout) qui a été touché au poignet par un débris enflammé. »
Georges Cain, À travers Paris, Flammarion, sd (1906 ?). Le chapitre Le passage de l'Opéra, p. 331-349, comprend neuf illustrations dont un plan (entre les pages 337 et 339) ; texte en ligne sur IA
Albert de Lasalle, Les Treize Salles de l'Opéra, librairie Sartorius, 1875, p. 235-279. Texte en ligne sur IA
[Henri Buguet et Georges d'Heylli], Foyers et Coulisses, histoire anecdotique des théâtres de Paris, Tresse éditeur, Paris, 1875 ; 8e livraison, Opéra, en trois tomes :
Elsa Cherbuy, L'Opéra de la rue Le Peletier. Architecte, genèse, programme., thèse de diplôme d'archiviste-paléographe, École nationale des chartes, 2013. Texte en ligne
Elsa Cherbuy, « La genèse de l’opéra le Peletier : un opéra provisoire pour le XIXe siècle », Livraisons de l'histoire de l'architecture, no 26, , p. 157–173 (ISSN1627-4970, DOI10.4000/lha.345, lire en ligne, consulté le )