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Tourelle de 81 mm modèle 1932

Tourelle de 81 mm à moitié en batterie (ouvrage du Latiremont, bloc 4).

La tourelle modèle 1932 pour deux pièces de 81 mm est l'un des types de tourelle qui équipent les blocs d'artillerie de la ligne Maginot. Il s'agit d'un modèle de tourelle à éclipse, installé en creux sur la dalle de béton de son bloc et armé avec deux mortiers de 81 mm modèle 1932. Son rôle était d'assurer la défense rapprochée de son ouvrage (notamment frontalement) et des casemates immédiatement voisines, en battant avec ses armes à tir courbe les zones inaccessibles aux mitrailleuses et canons.

Caractéristiques

La tourelle de 81 mm fait 2,35 mètres de diamètre à l'extérieur pour un total de 125 tonnes. Sa partie mobile est mise en batterie à l'aide d'un contrepoids à l'extrémité d'un balancier, le tout étant en équilibre, actionné par un moteur électrique (de marque Bréguet) ou manuellement. Une fois en batterie, elle émerge de 42 centimètres au-dessus de son avant-cuirasse, mais elle est complètement défilée dans sa cuvette, ce qui la rend peu vulnérable[1].

Son blindage est de 300 mm d'épaisseur d'acier, que ce soit pour la toiture comme pour la muraille (partie entre la toiture et l'avant-cuirasse). Une fois la tourelle éclipsée, la toiture repose sur les voussoirs d'acier de l'avant-cuirasse scellées dans la dalle de béton du bloc.

Armes

Elle était armée avec deux mortiers de 81 mm modèle 1932 en jumelage. Il s'agit d'une arme dérivée du mortier de 81 mm modèle 1927/31 Stokes-Brandt[N 1] équipant l'infanterie, adaptée aux dimensions de la tourelle et conçue pour envoyer ses obus dans les zones défilées. Son tube lisse est toujours incliné à 45°, la distance de tir est donc réglée par la charge additionnelle et un système de 18 évents sur l'obus empenné. La portée maximale de tir est de 2 400 (avec l'obus de 81 mm FA modèle 1932) à 3 600 mètres (avec l'obus de 81 mm FA modèle 1936 RF). La cadence de tir peut aller jusqu'à 13 coups par minute et par pièce.

Servants

Une tourelle de 81 mm nécessite une équipe de vingt hommes pour son service complet en situation de combat : six sous-officiers et quinze servants (l'équipe de combat est composée de l'équipe de veille et de l'équipe de piquet). En situation de veille, l'équipe réduite compte deux sous-officiers et sept servants (l'équipe de veille n'arme qu'un des deux mortiers à cadence lente)[N 2].

L'équipe de combat se répartit à raison d'un sous-officier (brigadier tireur) et d'un servant (tireur) dans la chambre de tir, quatre sous-officiers (un adjudant chef de tourelle, un maréchal des logis chef de pièces, un brigadier pointeur et un brigadier artificier) et onze servants (deux aides-pointeurs, un approvisionneur qui met les obus dans les norias et huit pourvoyeurs qui assemblent les projectiles), un sous-officier (brigadier) et deux servants (le premier s'occupe de la marche à bras du mouvement d'éclipse, le second des appareils électriques) à l'étage inférieur[2].

Équipements

Les tirs sont dirigés depuis le poste central de tir du PC artillerie de l'ouvrage, tandis que le pointage se fait indirectement (il n'y a pas de lunette de tir à vue) depuis l'étage intermédiaire de la tourelle à partir des renseignements fournis au PC puis directement au bloc par les observatoires. La communication entre le PC de l'ouvrage et celui du bloc se fait par téléphone, celle entre le PC du bloc et la tourelle se fait par transmetteur d'ordres (système visuel copié sur celui de la marine), tandis que celle entre l'étage intermédiaire et la chambre de tir se fait par tuyau acoustique ou par transmetteur[N 3],[3].

À l'étage intermédiaire se trouve aussi le magasin de munitions M 3, dont la dotation pour la tourelle était de 600 coups de 81 mm[N 4],[4]. L'alimentation de la tourelle en munitions se fait par une noria qui monte le projectile en position horizontale jusqu'à l'étage supérieur (la chambre de tir de la tourelle) et la dépose dans un mécanisme qui la place, par simple manœuvre d'un levier, devant la culasse mobile.

Le refroidissement des tubes peut se faire par aspersion d'eau (50 litres d'eau sont prévus par jour, stockés dans des citernes situées à l'étage supérieur du bloc[N 5])[5]. L'évacuation des gaz dégagés par les armes se fait par refoulement à l'extérieur, les blocs étant en légère surpression[6].

Liste des tourelles

Un total de 21 tourelles de 81 mm ont été installées, sur le total de 152 tourelles tous modèles confondus que compte la Ligne, toutes pour le front du Nord-Est. La commande est passée le auprès de Batignolles pour 23 tourelles, les deux surnuméraires (no 322 et no 323) ne seront pas installées[7].

Secteur fortifié de la Crusnes
Ouvrages Numéros du bloc Numéros de tourelle
Fermont 5 320
Latiremont 4 319
Bréhain 7 311
Secteur fortifié de Thionville
Ouvrages Numéros du bloc Numéros de tourelle
Molvange 3 310
Immerhof 3 316
Kobenbusch 6 318
Galgenberg 4 307
Métrich 5 301
Billig 6 313
Secteur fortifié de Boulay
Ouvrages Numéros du bloc Numéros de tourelle
Hackenberg 3 315
Hackenberg 10 317
Mont-des-Welches 1 306
Michelsberg 3 304
Anzeling 3 303
Secteur fortifié de Rohrbach
Ouvrages Numéros du bloc Numéros de tourelle
Simserhof 2 305
Simserhof 3 302
Schiesseck 1 309
Otterbiel 3 312
Secteur fortifié des Vosges
Ouvrages Numéros du bloc Numéros de tourelle
Four-à-Chaux 3 314
Secteur fortifié de Haguenau
Ouvrages Numéros du bloc Numéros de tourelle
Hochwald 2 308
Schœnenbourg 5 321

Notes et références

Notes

  1. Le calibre de 81 mm n'est autre que le diamètre des tuyaux de chauffage que fabriquait la société britannique Stokes avant la Première Guerre mondiale.
  2. L'équipage d'un bloc d'artillerie est divisé en trois équipes : l'équipe de veille, l'équipe de piquet et l'équipe de repos. Le bloc est occupé par deux équipes tandis que la troisième est au repos dans la caserne de l'ouvrage pour 24 heures. L'équipe de veille est en permanence aux postes de combat, l'équipe de piquet s'occupe des corvées ou se repose en dehors des alertes.
  3. Transmetteur d'ordres modèle 1937 C (Carpentier) entre le PC du bloc et la tourelle, transmetteur téleflex (plus compact) entre l'étage intermédiaire et la chambre de tir.
  4. La dotation totale en munitions de chaque pièce était de 3 200 coups par pièce, soit 1 500 dans le M 1, 1 400 dans le M 2 et 300 dans le M 3.
  5. Ces citernes sont alimentées par les eaux de ruissellement canalisées par des drains. En cas d'insuffisance, des wagonnets-citerne munis d'une pompe peuvent ravitailler les blocs en manque.

Références

  1. Mary et Hohnadel 2001, t.2, p. 72.
  2. Mary et Hohnadel 2003, t.3, p. 10-15.
  3. Mary et Hohnadel 2001, t.2, p. 125-126.
  4. Mary et Hohnadel 2001, t.2, p. 34.
  5. Mary et Hohnadel 2001, t.2, p. 40.
  6. Mary et Hohnadel 2001, t.2, p. 86 et 117.
  7. Mary et Hohnadel 2001, t.2, p. 105.

Voir aussi

Bibliographie

  • Philippe Truttmann (ill. Frédéric Lisch), La Muraille de France ou la ligne Maginot : la fortification française de 1940, sa place dans l'évolution des systèmes fortifiés d'Europe occidentale de 1880 à 1945, Thionville, Éditions G. Klopp, (réimpr. 2009), 447 p. (ISBN 2-911992-61-X).
  • Jean-Yves Mary, Alain Hohnadel, Jacques Sicard et François Vauviller (ill. Pierre-Albert Leroux), Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 1, Paris, éditions Histoire & collections, coll. « L'Encyclopédie de l'Armée française » (no 2), (réimpr. 2001 et 2005), 182 p. (ISBN 2-908182-88-2).
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 2 : Les formes techniques de la fortification Nord-Est, Paris, Histoire et collections, , 222 p. (ISBN 2-908182-97-1).
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 3 : Le destin tragique de la ligne Maginot, Paris, Histoire et collections, , 246 p. (ISBN 2-913903-88-6).
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 4 : la fortification alpine, Paris, Histoire & collections, , 182 p. (ISBN 978-2-915239-46-1).
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 5 : Tous les ouvrages du Sud-Est, victoire dans les Alpes, la Corse, la ligne Mareth, la reconquête, le destin, Paris, Histoire & collections, , 182 p. (ISBN 978-2-35250-127-5).

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Articles connexes

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